LA COURTE EVASION (Le sosie) |
CHAPITRE 5 À LA SATISFACTION DE TOUS |
En arrivant chez lui, Lorenzo me montra l'endroit où je pouvais dormir. Il avait préparé une paillasse spécialement pour moi. La chambre était petite et le jour nous placions ma paillasse sur la sienne. Après m'avoir montré l'endroit, il me dit, "Ainsi, tu es Giorgio. Même maintenant que je le sais, ça me semble incroyable... vous êtes physiquement si semblables..." dit-il tristement. Puis il ajouta, " Giacomo a préparé quelque chose pour dîner, si tu veux. Assieds-toi à table... tu dois avoir faim..." "Pas trop..." "Moi non plus, à vrai dire, mais ça serait mieux de manger. La vie continue, n'est-ce pas ?" dit-il en se forçant à un ton désinvolte. "Lorenzo... Je suis vraiment désolé. À cause de moi..." "Non. Il est le Prince héritier. Il devait de toutes façons reprendre sa place. Et puis c'est comme ça, même les plus belles choses ont une fin. Mais ce que je ne comprends pas..." commença-t-il avant de retomber dans le silence. "C'est quoi ?" lui demandais-je dans un murmure. "C'est que... vois-tu, j'étais amoureux de toi... Quand Giacomo est apparu, je pensais que c'était toi, et je lui ai donné l'amour que je pensais te donner, et je n'ai rien remarqué..." "Mais il a été capable de te retourner ton amour, pas moi... C'est lui que tu aimais en réalité, pas moi..." "C'est exactement ce que je ne comprends pas, ce qui m'étonne. Quel est celui que j'aime vraiment, toi ou lui ?" "Tu as vécu avec lui pendant des mois... vous avez partagé un amour. Pour moi, il est clair que c'est lui que tu aimes. Physiquement, nous sommes semblables. Mais l'intérieur est différent." "Oui, peut-être. Quand j'ai fait l'amour avec toi... et puis avec lui... oui, il y avait quelque chose de différent. Je pensais que c'était à cause de l'amnésie, mais maintenant, je m'aperçois que c'est quelque chose d'autre. Tu étais plus... impulsif. Il était plus tendre. Mais aussi semblables pour la façon de faire l'amour. Tu es peut-être plus simple, et lui plus raffiné. Mais vous êtes tous deux spontanés et sincères. Et si beaux ! Et puis, quand je te regarde, je le vois... ou peut-être, il est plus correct de dire que je le regardais et que je te voyais... Mais maintenant, je n'ai plus ni toi ni lui..." "Giacomo t'aime, il t'aime vraiment. Il trouvera le moyen que vous soyez ensemble... J'en suis sûr." "Mais comment ? Il devrait renoncer à tout. Même s'il le voulait, ils ne le laisseraient pas faire." "Il pourrait t'appeler à la Cour, non ?" "Moi ? A la Cour ? Un homme du peuple ? Tu imagines ? Non, c'est pas possible. Et même si ça l'était, je me sentirais comme un poisson hors de l'eau. Et puis je ferais quoi, à la Cour ? Serviteur ? Et comment le Prince pourrait-il faire l'amour avec un serviteur ? Peut-être en secret, parfois. Mais nous ne vivrions pas ensemble, non ? Non, c'est fini, tout simplement. Inutile de se faire des illusions." Je me sentis coupable de la peine que je percevais dans ses mots. J'aurais aimé pouvoir faire quelque chose pour lui, mais quoi ? Non, je n'ai pas pensé à ça un seul instant ! Ni lui non plus, j'en suis sûr. J'étais amoureux de toi, et lui de Giacomo. Aussi ressemblants que nous soyons, ça ne pouvait pas recommencer, entre lui et moi. Tu n'as quand même pas imaginé que ça puisse arriver ? Ah bon, heureusement ! Cette nuit-là, aucun de nous n'a dormi. Je l'entendais tourner et tourner encore dans son lit qu'il devait trouver bien vide. Quant à mes pensées, elles étaient partagées entre sa douleur, le choix de Giacomo et le vide de ton absence. Le matin suivant, il se prépara pour aller au travail. "Je vais devoir inventer un prétexte pour expliquer son absence. Le patron sera fou, qu'il disparaisse sans préavis, mais... qu'y puis-je ?" dit-il, songeur. "Je peux venir. Comme vous étiez ensemble, tu pourrais me dire quoi faire et comment, non ? Personne n'y verra rien." "Pourquoi ? Depuis tu devras arrêter, un jour ou l'autre, et alors je devrais quand même trouver un prétexte." "Et bien pour trois raisons. D'abord je n'aime pas l'idée d'attendre Gualtiero en me tournant les pouces. Je vais mourir de tristesse et d'ennui... Ensuite, c'est qu'il faut que je gagne ma vie, je ne vais pas vivre à tes crochets, non ? Et enfin, on peut préparer une raison pour le jour où je devrai partir... S'il te plait..." Je réussis à le convaincre. Le travail n'était pas très compliqué. Et comme je l'avais prévu, personne ne remarqua que je n'étais pas "ce" Giorgio... Au travail, Lorenzo appelait chacun par son nom, pour que je puisse faire de même J'ai eu à peu près les mêmes difficultés que celles qu'a trouvées Giacomo en rentrant à la Cour, sauf que pour lui, le prétexte d'avoir retrouvé la mémoire a peut-être rendu les choses un peu plus faciles. Et Lorenzo a rempli pour moi un rôle équivalent à celui que tu avais avec Giacomo. Comment était Lorenzo ? Il faisait face avec courage... Mais c'est sûr qu'il souffrait beaucoup. Une fois, il me dit, "Oui, c'est vrai, tu es différent. Ça se voit, petit à petit. Non, pas physiquement, vous êtes vraiment jumeaux. Mais vos expressions, votre façon de bouger, de penser. En fait, même là, vous vous ressemblez, mais vous êtes différents. Qui sait ce qu'il peut faire, à présent ?" J'aurais voulu lui répondre, "Il pense à toi" De ce que tu m'as dit, je pense vraiment qu'il pensait à lui... Comme je pensais sans cesse à toi. Et toi à moi, je sais. Mais, je ne sais pas pourquoi, je n'ai rien dit. Peut-être que je trouvais la réponse inadaptée, ou peut-être que je sentais que je risquais d'aggraver sa peine, avec cette réponse. Une autre fois, à l'inverse, il me demanda, "Après avoir vécu plus de six mois comme un Prince, n'est pas dur de ne plus avoir tout ça ?" "Non, pas du tout. Il n'y a que l'absence de Gualtiero qui me pèse..." ai-je dit et je me suis mordu la langue. Je pourrais te retrouver bientôt, mais pour lui, au contraire... Mais heureusement il ne semble pas avoir pensé ça. Et puis il m'a demandé, "Comment était la vie à la Cour ?" "Supportable, parfois. Mais c'est sûr que là, je suis bien plus libre. Le confort... Et bien tu sais, je l'ai payé au prix de beaucoup, de trop de sacrifices. Un prince est vraiment prisonnier d'un certain point de vue. Je ne pense pas que j'aurais résisté plus longtemps... C'est pourquoi j'ai demandé à Giacomo de reprendre sa place. Je sais qu'à faire ça je t'ai fait du mal, que j'ai agi en égoïste, mais..." "Non, il fallait que tu reviennes à ta place et lui à la sienne. Ça ne pouvait être que comme ça." "Mais il se sentait bien, ici. Il était heureux avec toi. Le problème, c'était moi, et je lui avais tout enlevé." "Non, tu lui as plutôt donné six mois de bonheur et de liberté. Il le pense, il me l'a dit, avant qu'on se sépare. Et il t'en est reconnaissant, quoi qu'il en soit." "Parce que Giacomo est bon." "Oui, ce que tu dis est exact, il est bon... et il est juste. Il sera un bon roi, quand son heure viendra." La fierté avec laquelle il le dit, m'émut. Il y avait dans ces mots tout l'amour que Lorenzo avait pour Giacomo. Quand j'ai reçu de toi cette première lettre que je n'attendais pas, puisque tu ne m'avais pas dit que tu m'écrirais, j'étais radieux. Elle était pleine d'amour pour moi. Tu me décrivais la réintégration de Giacomo à la Cour, que tout se passait bien, sauf qu'il était triste de sa séparation d'avec Lorenzo, et qu'il se torturait l'esprit pour trouver une manière de le reprendre avec lui. Et puis je connaissais un peu la Cour, alors après avoir reçu cette lettre, j'ai commencé à réfléchir à ce que je ferais à la place de Giacomo, si je voulais Lorenzo à mes côtés. Tu sais bien quel est le fruit des réflexions que j'ai mis dans la lettre que je t'ai envoyée. Et je suis si content que le plan que j'avais imaginé, même avec quelques changements, ait été bien accueilli par Giacomo et exécuté. Je connaissais assez bien, peut-être pour avoir fait l'amour avec lui pendant une assez longue période, la mentalité d'Ermanno, le secrétaire. J'étais sûr que, en le prenant bien, il deviendrait volontiers le complice de Giacomo. J'ai été d'accord avec toi, qu'à la différence de mon plan, Ermanno ne devait pas être informé des échanges entre Giacomo et moi, et donc de mon existence. Cette information lui aurait donné trop de pouvoir sur Giacomo. Il devait croire que Giacomo, durant ses séjours au château, avait eu la possibilité de rencontrer Lorenzo, d'en tomber amoureux, et qu'il voulait le ramener à la Cour, près de lui. Et c'est tout ce qu'on dirait à Ermanno. Et je dois dire qu'Ermanno établit un plan très simple et bon, qui d'ailleurs fonctionna parfaitement. Mais ce que je n'avais pas prévu, c'est que j'aurais des difficultés à persuader Lorenzo de la faisabilité de ce plan et donc de le lui faire accepter. Je pense que ce qui l'a enfin persuadé ne fut ni mes paroles ni mes raisonnements, mais son amour pour Giacomo et son désir d'être à ses côtés. Quand j'ai reçu ton message où tu m'expliquais le plan d'Ermanno, j'en ai parlé à Lorenzo. "Écoute, Lorenzo. Giacomo, Gualtiero et moi avons imaginé un plan pour t'introduire à la Cour." ai-je commencé. "Vraiment ? Je vais pouvoir revoir Giacomo ? Même juste de loin, quelques minutes... Je le voudrais tant ! A quoi avez-vous pensé, dis-moi." dit-il en s'illuminant. "Non, il n'est pas question de le voir de loin, ni quelques minutes. Mais de vivre près de lui, et pour toujours." "Allez !" dit-il en se renfrognant de nouveau, avec l'expression de quelqu'un dont on se moque. "Attends, je dois d'abord t'expliquer quelque chose. Quand j'étais à la Cour, avant de tomber amoureux de Gualtiero, pendant plusieurs mois, j'ai fait l'amour avec mon secrétaire qui s'appelle Ermanno. Il ne sait rien ne notre échange. Mais Giacomo (qu'Ermanno pense être moi) lui à dit que quand il est venu au château, il t'a rencontré et il est tombé amoureux de toi, et que donc, maintenant, il te veut à ses côtés, à la Cour, et il lui a demandé de l'aider pour que ça devienne possible. Et Ermanno a monté un plan très simple. Il te présentera comme une connaissance et il demandera à ce que tu sois engagé comme son aide. Il t'apprendra le travail et, quand tu seras prêt, il te laissera sa place comme secrétaire du prince. Giacomo, en échange, lui donnera une position plus importante. Tu sais, le secrétaire du prince vit au contact du prince, tu peux, et même tu dois le rencontrer tous les jours, et tu pourras aussi faire l'amour sans problème." Il écouta, toujours renfrogné, mais sans m'interrompre. Quand j'eus fini, il dit, "Moi à la Cour ? Un secrétaire ? Je sais à peine lire et écrire ! Et puis je ne sais pas me conduire comme un membre de la Cour, ni... tout ça. Comment je pourrais... Non, non. Ce ne sont que des rêves." "Ermanno t'instruira. Bien sûr, tu vas devoir t'appliquer, et peut-être qu'au début, ce sera difficile, mais... ça en vaut la peine, non ? Tu auras Giacomo près de toi, et lui et Ermanno, en plus, pour t'aider. Il n'y a rien d'impossible. En plus, je suis arrivé à jouer le prince, ça sera bien plus facile pour toi de vivre à la Cour ? Tu ne penses pas que ça vaille la peine au moins d'essayer ? Ça n'a pas de sens d'abandonner avant même d'essayer, non ?" "Je... Mais alors, peux-tu m'imaginer, moi l'amant du prince héritier ! Tant que je pensais que c'était toi, un comme moi... mais maintenant..." "Prince ou pas prince, c'est toujours lui, non ? Et il t'aime, non ? Et tu l'aimes, non ? Penses-tu que l'amour soit différent suivant la classe sociale des gens ? Giacomo, avant d'être un prince, est un homme, comme toi, comme moi, et il t'aime..." "Classe... Oui, tu as dit le mot juste. Nous appartenons à deux classes sociales trop différentes." "Mais quand tu faisais l'amour avec lui, quand vous viviez ensemble, il n'y avait aucun problème, pas vrai ?" "Non, c'est sûr que non. Mais je ne savais pas que c'était le prince. Je pensais que c'était toi." "Alors le problème est seulement dans ta tête. En réalité, il n'y a pas de vrai problème, il n'existe pas !" "Mais si ! Moi à la Cour..." "Ne pense pas comme ça. Pense plutôt à ce que tu peux vivre avec Giacomo. N'est-ce pas ce que tu désires ?" "Ce que je désire, dis-tu ? Ce dont je rêve ! Mais il y a deux genres de rêves. Ceux qu'on peut peut-être rendre réels, et ceux qui n'arriveront jamais. Et le mien appartient à la deuxième catégorie, ça me paraît évident." "Faire que les rêves se réalisent, parfois, ne dépend que de nous. Et ce rêve, maintenant, ne dépend que de toi. Essaye de le comprendre !" Et puis nous nous sommes presque querellés. Mais je ne voulais pas abandonner. Pas parce que j'avais le premier eu l'idée de ce plan, mais parce que j'avais des remords pour le chagrin de Lorenzo et Giacomo, comme si c'était de ma faute. Si je convainquais Lorenzo, je pourrais me libérer d'un poids sur la conscience. Et puis tu le sais... Je m'aime bien, non ? Bien sûr, je voulais me sentir bien, ne plus avoir de remords, est-ce que ça te semble curieux ? Mais c'est vrai que j'aime aussi beaucoup Lorenzo et Giacomo, et en réalité je pensais beaucoup à leur bonheur. Nous en avons parlé pendant plusieurs jours, c'est pourquoi tu ne recevais pas ma réponse. Je voulais t'écrire que tu pouvais mettre en œuvre notre plan. Et puis au bout d'un certain temps, Lorenzo a finalement capitulé. Il me l'a dit d'une manière assez particulière. "Giorgio... Est-ce que toi et Gualtiero avez décidé quoi faire une fois que vous serez réunis ?" "Non, pas vraiment. Il va quitter la Cour et il viendra ici. Et puis on décidera. Nous devrons trouver un travail, une maison. On n'a pas vraiment eu le temps pour faire des projets précis." "Il est riche ?" "Sa famille est riche, c'est sûr. Mais lui, de son côté, je ne pense pas qu'il ait grand chose. Et il ne peut pas demander d'aide à sa famille, avec le choix qu'il a fait. Un peu comme pour toi." "Oui, je vois. Tu sais, je pensais... au moins pour commencer, jusqu'à ce que vous trouviez mieux, vous deux pourriez vivre ici, dans cette maison." "Merci. C'est très gentil... mais ici, c'est juste bon pour un couple. À trois, on se marcherait sur les pieds, même sans le faire exprès. Et puis, étant enfin réunis, lui et moi, nous aimerions avoir notre intimité, tu comprends, et ici, ça n'est pas possible." "Qui parle de vivre à trois là dedans ? Je serai parti, de toutes façons." "Tu seras parti ? Et où ? Tu penses peut-être à rentrer dans ta famille ?" "Dans ma famille, jamais de la vie ! Je pensais juste que... Je pourrais essayer de devenir... secrétaire." J'étais tellement heureux que finalement il décide d'accepter, que j'ai eu envie de le serrer dans mes bras ! Alors enfin, je t'ai écris. Et tout a été réglé d'un coup. Ou pour mieux dire, par rapport à avant, tout me semblait facile, mais d'un coup, quand Lorenzo me quitta pour rencontrer Ermanno, mille difficultés commencèrent à se présenter à mon esprit. Entre autres, qu'Ermanno pourrait essayer avec Lorenzo, rendant les choses plus difficiles. Tu ris ? Oui, je suis d'accord, ça n'est pas arrivé, mais connaissant Ermanno, ça aurait pu arriver, crois-moi... Et puis c'est vrai, s'il avait essayé, il aurait risqué gros avec le prince... Oui, c'était une crainte stupide, mais sur le moment, ou plutôt, ces jours-là, j'ai aussi pensé à ça. Et donc Lorenzo quitta son travail, mais j'ai continué. Exactement le contraire de ce que nous avions prévu ? C'est drôle, non ? Je t'ai attendu. Un mois c'est passé et le fait que Giacomo te demande de rester quelques semaines de plus ne m'a pas fait plaisir, même si je comprenais que nous n'étions pas en mesure de lui refuser ça. Oui, surtout parce qu'il n'avait pas refusé de reprendre sa place. Oui, je sais que je te manquais beaucoup, mon amour. Et pendant tous ces jours, il m'en coûtait beaucoup. Mais tout est bien qui finit bien, non ? C'est sûr que ça ne pouvait pas mieux se finir. En plus du fait que Giacomo nous a plus qu'abondamment remerciés pour ce que nous avons fait pour lui et son amant, non ? Voilà, c'est tout... Non, il y a encore une chose que je ne t'ai pas dite... Non, ce n'est pas un secret que je voulais garder. Tu sais que je ne veux avoir aucun secret pour toi ! Ça m'avait seulement échappé. Quand enfin, nous nous sommes retrouvés, et c'est seulement maintenant que je m'en rappelle. Pour la première fois, je rentrais, je m'en rappelle. Surtout parce que ça n'est pas une chose importante. Si, si, je vais te la raconter... Et donc Lorenzo était parti depuis quelques jours. Comme d'habitude, j'allais travailler tous les jours. Un soir, alors que je rentrais à la maison, en passant devant l'auberge du Coq, tu sais, celle en face de l'Eglise San Taddeo, un client sortit et me rentra presque dedans. Je m'excusais et... nous nous reconnûmes mutuellement. Tu ne devines pas qui c'était ? Timoteo en personne, oui, tu as raison. Et il me reconnut et dit, "Oh, ça fait une paye qu'on c'est pas vu, non ? Et ainsi, tu es là, en ville, Giorgio ? Qu'est-ce que tu fais de beau ?" Au début, je fus tenté de lui dire qu'il se trompait, que je n'étais pas Giorgio, et puis j'ai pensé que ça serait stupide et inutile. "Je travaille... et toi ? Qu'est-ce que tu fais en ville ?" "Des affaires. Pour l'auberge... Tu es seul ?" "Non. Je rentre le retrouver." ai-je répondu sur la défensive. En fait je n'aimais pas sa façon de me regarder. Comment ? Avec... ironie, convoitise, acuité... Je ne peux pas dire exactement, mais je n'ai pas du tout aimé son regard. J'ai pensé qu'en lui disant que je retournais "le" voir, qu'on m'attendait à la maison, mon homme, au moins il n'essaierait pas de me suivre. "Ah, ton Lorenzo ?" me demanda-t-il. Je savais que Giacomo ne lui avait pas parlé de Lorenzo , alors je pris une expression étonnée et je répondis, "Lorenzo ? Qu'est-ce que Maître Lorenzo a à faire avec moi ?" "Allez ! D'abord tu me dis que tu es amoureux d'un autre homme, et puis vous disparaissez tous les deux du village, en même temps... deux et deux font quatre, non ? Une fugue amoureuse, non ?" "Avec Maître Lorenzo ? Qu'est-ce que je sais de Maître Lorenzo ! Je ne suis pas avec Maître Lorenzo !" "Et avec qui, alors ?" "Tu ne le connais pas..." "Je voudrais bien le voir, alors..." me dit-il. "Pourquoi ? Je n'y vois pas de raison..." "Allez, Giorgio... après tout, tu as été mon petit copain. Tu ne te souviens pas de toutes ces bonnes baises ? Je voudrais voir celui qui te baise à présent... le rencontrer... Pour voir celui que tu préfères à moi, à mes bonnes baises." "Bonnes ! ! ! Tant que tu ne m'as pas contraint. Et ça, je ne peux pas te le pardonner." "Allez ! Tu as aimé, tu ne peux pas le nier. Et puis, honnêtement, tu me plaisais, non, tu me plais toujours beaucoup. Et puis non, après tout, je ne suis pas intéressé à voir ton amoureux. Qu'est-ce que tu dirais plutôt de rentrer chez toi un peu plus tard, ce soir ? Ou pourrait trouver un endroit et..." "C'est quoi, une proposition ?" lui demandais-je d'un ton moqueur. "Tu sais, après tout, tu m'as vraiment manqué. Oui, honnêtement, tu m'as manqué. Et maintenant, tu es là de nouveau... et plus désirable que jamais..." "Ah oui ? Ta femme ne te suffit plus ?" "Non, c'est pas ça. Je veux dire, j'ai trouvé un autre garçon. Tu sais, le cadet du meunier. On l'a pris à ta place et... il a vraiment pris ta place, même dans ce sens. Mais pour faire l'amour, tu étais meilleur. Bon, Guiseppe fait de son mieux, mais... Il était toujours vierge tu sais, la première fois que je l'ai pris. Comme il couinait ! Toi au moins, tu ne faisais pas de manières. Mais il s'est habitué et il ne se plaint plus, au contraire..." dit-il en riant. "Je parie que tu l'y as forcé comme tu m'as forcé quand je t'ai dis que je voulais pas qu'on continue, non ?" "Ben tu sais, au début, j'ai tenté de le persuader par la douceur, mais il... Pendant qu'il me touchait ou qu'il me laissait le toucher, il était d'accord, et comment ! Mais quand je lui ai demandé de me sucer, il ne voulait pas et tu vois... J'étais tellement excité, je le voulais tellement. Alors je l'ai attrapé, mis sous moi, et au lieu de sa bouche... Dieu qu'il était serré ! Ça me faisait presque plus mal à moi qu'à lui ! Mais quel pied ! Après avoir joui, j'ai continué à le baiser, et j'ai joui une deuxième fois, cette fois là ! Mais maintenant, il fait tout ce que je lui dis, il la suce ou la prend dans le cul sans faire d'histoires et il aime aussi, je te le garantis. Mais tu es meilleur, honnêtement. Et maintenant qu'on s'est retrouvé, regarde comment elle est devenue dure rien qu'à te voir !" conclut-il en montrant l'érection bien visible entre ses jambes. "Je suis désolé pour toi, Timoteo, mais tu vas devoir te soulager sans moi. Parce que je retourne le voir. Bonne nuit." Timoteo attrapa mon bras, "Allez, attends ! Je te le demande comme une faveur, juste un service à un vieux copain. Je sais que tu aimais la manière dont je te la mettais. Et puis je suis ton premier, non ? Juste une fois, qu'on se sépare sur un bon souvenir. On va trouver un coin tranquille. Ne fais pas le difficile." "Lâche-moi !" lui dis-je d'un ton décidé, mais sans élever le ton. Il reprit soudain un air sérieux (il avait jusque-là eu un sourire narquois sur les lèvres) et me laissa aller. Mais il dit, "Pourquoi me fais-tu une telle insulte ? Si tu veux que je sois ton ennemi, je peux te le faire regretter, tu sais ?" "Tu ne sais que menacer, parler d'une grosse voix, hein ? Pauvre Timoteo. Tu as l'habitude d'avoir ce que tu veux, et de le prendre si on ne te le donne pas ? Tu crois que tu me fais peur ? Qu'est-ce que tu veux faire, me menacer encore de me tuer si je ne te donne pas mon cul ? Ou m'enculer ici, dans la rue ?" Il ne s'attendait pas à une réaction aussi décidé et aussi assurée, je pense. Il se calma. "Mais... non... C'était juste pour plaisanter." dit-il en souriant. "D'accord, mais tes plaisanteries ne m'amusent plus. Plus du tout. Retourne au village, Timoteo. Baise ta femme, ton mec, au moins tant qu'il est d'accord, baise qui tu veux, mais laisse-moi tranquille." "Mais c'est que tu me plais tellement." dit-il en changeant complètement de ton. "Tu me plaisais aussi. Oui, c'est vrai, tu me plaisais. Jusqu'à ce que tu me forces. Tu pourrais être gentil, si seulement tu comprenais que les autres ne sont pas des jouets, des objets... un trou pour s'amuser. Mais au contraire... Bonne nuit, Timoteo, Adieu." Il m'a regardé sérieusement. Et puis il a dit, "Adieu, alors..." et se retournant, il est parti à grands pas. J'ai poussé un soupir de soulagement et je suis rentré à la maison. Dans un sens, il me faisait pitié. Non, je ne l'ai jamais revu depuis cette époque. À vrai dire, après ce soir-là, pour renter chez moi, j'ai changé de chemin. Je ne voulais pas prendre le risque de le croiser de nouveau. Et ainsi... maintenant, tu sais tout de moi, vraiment tout... Oui, je peux avoir oublié quelque chose, mais si je m'en rappelle, je te le dirais. Nous avons tant de temps devant nous, si Dieu veut, non ? Écoute, Gualtiero, veux-tu remettre un peu de bois dans la cheminée ? Non, je n'ai pas encore envie d'aller me coucher, ce soir. Oui, bien sûr... Mais on peut aussi le faire ici, non ? J'aime tellement le faire en face de la cheminée, comme les autres fois... Oui, j'ai fermé la porte à clé, ne t'inquiète pas. Et puis tu sais qu'il ne peut pas entrer sans frapper ? Bien sûr, je pense qu'il a compris pour nous, mais c'est un serviteur fidèle, discret, il ne nous créera pas de problèmes. Tu me chatouilles, alors... viens... Oui, je préfère comme ça. Oui, c'est bien mieux. Ça me plait. Tu me plais Je t'aime... .........................
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