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histore originale par Andrej Koymasky


L'ÂME DANS LE PORTABLE 1 - JOHN

Eugenio sortit le nouveau téléphone portable de l'emballage et en lut les instructions. Il y mit les piles, puis il l'essaya : il appela un ami. Il entendit la tonalité de ligne libre.

"Allô ?"

"Salut, Dario. C'est Eugenio."

"Oh, salut ! D'où appelles-tu ?"

"De chez moi."

"T'as installé le téléphone, finalement ?"

"Beaucoup mieux, je me suis acheté un beau téléphone portable, gros comme un paquet de cigarettes ; je viens de l'acheter et tu es le premier que j'appelle."

"Quel honneur ! On entend bien. Comment vas-tu?"

"Bien, et toi ?"

"Très bien." répondit Dario.

"Et avec Fulvio, ça va?"

"Oui, on a fait la paix : il va même mieux qu'avant."

"Je suis vraiment heureux."

"Et toi ? Quelque chose de nouveau ?"

"Non. Des plans cul, mais rien d'important."

"Tu ferais mieux de te lancer, non ? Le temps presse, et..."

"Hey, ne me traite pas comme un vieil homme ! Après tout, je n'ai que vingt-six ans !"

"Mais oui, oui, je plaisantais, allez ! Écoute, peux-tu venir chez nous le mois prochain ? Nous organisons une fête pour notre huitième anniversaire et nous aimerions que tu viennes."

"Bien sûr, le 27 avril, c'est ça ?

"Tu te souviens de la date ?"

"Comment ne pas s'en souvenir ? C'était l'anniversaire de Carlo. Il vous avait invité à la fête, vous vous êtes rencontrés chez lui."

"Oui, c'est vrai. Et tu étais un garçonnet délicieux. Pauvre Carlo..."

"Ouais... Eh bien, je vais te laisser maintenant, Dario. À la prochaine."

"Attends, donne-moi le numéro !"

"Ah oui..."

Il raccrocha et repensa à Carlo : ils étaient devenu amants quand il avait dix-sept ans. Ils avaient été ensemble pendant trois ans, jusqu'à la mort de Carlo.

Il avait toujours le portable à l'oreille, alors qu'il réfléchissait à ces choses, quand il entendit une voix :

"Salut !"

"Dario ? T'es toujours en ligne ?" demanda-t-il, étonné.

"Non, je ne suis pas Dario." dit la voix légèrement métallique, "je suis ton nouveau téléphone, pour ainsi dire."

"Hein? Allez, arrête ça ! Tu es Dario !"

"Non. Essaye de raccrocher."

Eugenio secoua la tête en souriant : ce farceur ! Il raccrocha et remit le téléphone à son oreille.

"Vois-tu ? Je suis toujours là."

"Comment t'as fait ? Qui es tu ?"

"Le téléphone, pour ainsi dire."

"Allez ! C'est quoi, une interférence ?"

"Non, Eugenio, je te parle vraiment de dedans le téléphone. Je suis une âme."

"Ouais, maintenant même les téléphones ont une âme !"

"Pas vraiment, je ne suis qu'un hôte temporaire, pour quelques jours. Jusqu'à ce que je me réincarne dans un nouvel être, dans un nouveau corps."

"Mais allez ! Je n'ai jamais cru en la réincarnation, moi ! Qui es-tu ?"

"Je n'ai pas de nom et j'en ai plusieurs : de tous ceux que j'ai été. Tu peux m'appeler par le nom de ma dernière incarnation, si tu veux : John."

"John ? Et qui serait-ce, ce John ? Un Américain ?"

"Non, un Anglais, le technicien qui a testé ce téléphone : il est mort en me testant. J'ai dû donc entrer ici dedans."

"Et pourquoi ?"

"Parce qu'à la mort de notre corps, nous sommes attirés par le métal noble le plus proche et, ici, il y a un peu de platine."

"Ah, comment tu te trouves, ici dedans ?"

"Comment je m'y trouve ? Je suis juste là, c'est tout."

"T'as une belle fantaisie..."

"Mais allez ! Regarde, nous, les âmes, ne pouvons jamais mentir. Je suis l'âme qui a appartenu au feu John."

"Et maintenant, tu es prisonnier du téléphone."

"Mais quel prisonnier ? hôte, jusqu'à ce que je me réincarne à nouveau."

"Quand ?"

"Je ne sais pas ; après la mort du précédent, il doit passer au moins cinquante jours, parfois plus. Ça fait déjà vingt-neuf jours, alors..."

"Et comment te réincarnes-tu ?"

"Lorsqu'un spermatozoïde pénètre dans un ovule, l'âme disponible la plus proche est comme aspirée."

"T'es bien naïf : comment veux tu que je croie en des telles conneries ; de plus, s'il en était ainsi, la population ne serait pas en augmentation constante, elle serait toujours composée du même nombre d'âmes."

"Non, il y a aussi de nouvelles âmes, pas encore incarnées. Ce sont nos concurrents qu'on craint le plus, car ils sont très rapides. Parfois, nous restons aussi sans corps pendant des années."

"Alors tu serais l'âme de John, un testeur de téléphones portables."

"Et des centaines d'autres. La première fois que j'ai été incarné, c'était il y a presque dix mille ans."

"Punaises, mais tu es vieux alors !" dit Eugenio en riant.

"Une âme ne vieillit pas, mûrit petit à petit, apprend quelque chose de chaque incarnation. Et une âme n'oublie rien, pas même ce que son corps peut oublier. De cette façon, elle s'enrichit de plus en plus..."

"Et ensuite ? Tout cela aura une fin, non ?"

"Je pense que oui, mais ne me demandez pas : je ne connais que ce que j'ai appris jusqu'à présent."

"Et ... dis moi, dieu, existe-t-il ?"

"Si tu veux mon opinion personnelle, je pense que oui, mais ce n'est pas que j'en sache plus que toi. Je veux dire, je sais beaucoup plus de choses que toi, j'ai l'expérience de mille vies, mais..."

"Cent ou mille ?"

"Tu essayes de me coincer, hein ? Cent, mille, ce n'est que des numéros qu'on utilise pour dire beaucoup, non ? Si tu veux le savoir exactement, je me suis réincarné trois cent soixante et une fois."

"Et tu te souviens de toutes ?"

"Bien sûr."

"Et donc aussi mon âme se souvient..."

"Bien sûr."

"Mais je ne me souviens de rien."

"Lorsque nous entrons dans un corps, nous perdons momentanément la mémoire de toutes les vies précédentes, sinon cela nous affecterait trop dans notre nouvelle vie. Mais à la mort de notre corps, nous retrouvons la mémoire complète, enrichie par de nouvelles expériences. Ceci, au moins, est la théorie que je me suis faite."

"Tu parles de toi toujours au masculin : y a-t-il des âmes mâles et des âmes femelles ?"

"Non, l'âme n'a pas de sexe. Bien que je me sois toujours incarné chez les hommes et les gays comme toi. C'est pourquoi j'ai eu envie de te parler."

"Une âme gay ! Oui, c'est une bonne trouvaille !"

"Non, ce n'est pas une trouvaille, c'est un fait. Nous sommes probablement attirés par certaines combinaisons de gènes..."

"Alors, à ton avis, être gay est une chose génétique ?"

"C'est probable, je ne me suis jamais incarné dans un homme de science, je ne sais pas exactement, mais mon expérience me le fait penser."

"Alors, est-ce qu'un est gay parce qu'il reçoit une âme gay ?"

"Ou plutôt le contraire, je ne sais pas."

"Jamais incarné dans un hétéro ?"

"Non, tout au plus chez un bisexuel, pour ainsi dire."

"Et jamais chez une femme."

"Jamais, du moins jusqu'à présent. Mais trois cent soixante et une fois ne sont pas beaucoup, je pense."

Eugenio pensait que la blague, quiconque la lui faisait, était amusante, alors il poursuivit à causer. "Alors, parle-moi de ce John..."

"Si tu veux... Je me suis incarné le 13 mars 1950. Je suis le fils d'un fermier du pays de Galles. Je grandis à la campagne. Depuis que je suis gamin, je suis fort, vif, curieux mais timide.

"Peu de temps après la puberté, je commence à ressentir de l'intérêt pour mes compagnons plus âgés, mais un peu pour l'éducation, la religion, pour diverses raisons, je résiste toujours à la tentation. Ce n'est pas non plus qu'il y ait tant d'occasions à dire le vrai : je vis dans une petite communauté puritaine très contrôlée.

"Mais quand je ressens ces états d'excitation indéfinissables, je rêve d'être dans les bras d'un compagnon beau, fort et passionné. Seulement des rêves, dont après je suis immensément honteux. A dix-sept ans, je vais étudier en ville, l'électronique. Je vis dans un internat. Ici, un de mes camarades de classe, âgé d'un an de plus que moi, commence à me courtiser. Mais je le refuse, je l'éloigne de moi."

"Tu ne l'aimais pas ?"

"Oui qu'il me plaît, et beaucoup. Quand il me caresse, quand nous sommes seuls et que nous étudions ensemble, je suis très excité, mais je le rejette. J'ai peur de mon propre désir. Il essaie plusieurs fois, mais n'insiste pas trop, donc rien ne se passe. Après avoir terminé mes études, je trouve immédiatement un travail et peu de temps après, je rencontre une fille sympathique et jolie, nous décidons de nous marier, je veux être normal."

"Une erreur que beaucoup de gays refoulés font, celle-là. J'ai eu de la chance, je me suis accepté tout de suite."

"Pas moi. On se marie. Je l'aime, je pense que ça peut marcher. Et au contraire... Dès la première nuit de mariage, ça ne marche pas, je vais bien avec elle, j'aime la caresser, être caressé, mais je ne m'excite pas du tout. Elle a de la patience pendant un moment. Puis elle me conseille de me faire consulter, mais rien ne change. À la fin, elle demande le divorce, la pauvre Mary Ann... Je reste seul trois ans. Je me sens de plus en plus attiré par les hommes, mais je lutte toujours. Jusqu'à ce que je connaisse Nick. C'est un garçon irlandais de trois ans plus âgé que moi. Aussi beau que le soleil..."

"Qui sait pourquoi personne ne tombe amoureux de quelqu'un de moche ?"

"Parce que le concept de beauté est totalement subjectif et que, à un moment donné, on voit une beauté que les yeux ne voient pas. Ne sois pas si naïf !"

"Bah, je sais seulement que dans toutes les histoires, les protagonistes sont toujours très beaux..."

"Veux-tu que je continue ou pas ?"

'Ben, ne prétends pas être offensé, maintenant. Oui, continue, l'histoire est assez intéressante. Alors tu as rencontré Nick..."

"Je ne me suis jamais senti attiré par personne comme par lui, et d'ailleurs, comme il ne me fait jamais d'avances sexuelles, je me sens complètement à l'aise avec lui, je ne sens pas la tentation de fuir. Nous allons ensemble au pub, à des courses de chevaux, à des promenades, au cinéma. Nous parlons longtemps et nous devenons de plus en plus intimes. Et je comprends que lui aussi est gay, alors, peu à peu, je m'ouvre avec lui, je lui explique mes problèmes. Nick écoute, pose des questions, ne me donne jamais de réponses, me les fait trouver petit à petit. C'est une personne merveilleuse, Nick. Avec lui, je suis plus que bien, je peux être moi-même..."

"Travaillait-il avec toi ?"

"Non, il fait... C'est un maître d'école primaire. Il fait partie de l'IRA, comme je le découvre plus tard. Cet été, nous allons à la mer ensemble. Nous prenons une chambre double dans un charmant Bed and Breakfast juste à côté de la plage. Un soir, allant nous coucher, il s'assied au bord de mon lit.

"Nous bavardons. Il me caresse la main. Je caresse la sienne. Il me caresse la joue avec tendresse. On ne parle plus, on se regarde en silence. Il se penche pour m'embrasser. Je réponds à son baiser. Il commence à me déshabiller : je suis excité, je me laisse déshabiller en frémissant dans l'attente. Je sais ce qu'il veut de moi et je me sens étrangement prêt à le lui donner. Je suis bien, entre ses bras. Il se déshabille, il vient sur moi, il m'embrasse, je l'embrasse, nos langues jouent à cache-cache, je suis tout excité, je suis prêt à le suivre jusqu'au bout du monde. Nous explorons nos corps, nous apprenons à nous connaître et enfin, nos bouches trouvent nos érections frémissantes et nous nous rejoignons en un cercle de plaisir..."

"C'est à dire vous faites un soixante-neuf, non ?"

"Oui bien sur. Il commence à me lécher entre les fesses, ma réaction est très forte, un plaisir intense. Je comprends ce qu'il veut et je m'offre volontiers à lui. Il prend mes jambes sur ses épaules et me sourit. Je hoche la tête. Il me prépare longtemps, je me sens prêt. Et finalement, il s'appuie contre moi et me regarde avec son doux sourire. Je hoche la tête à nouveau, il commence à pousser et je le reçois en moi. Et je me sens enfin comblé : j'ai trouvé ce dont tout moi même avait besoin. Il frétille sur moi, en moi, avec une ardeur de jeunesse, je réponds avec un enthousiasme fervent. En me prenant, il m'embrasse et je sens que je ne peux rien souhaiter de plus de la vie. Je sens lui appartenir, qu'il m'appartient. Son membre fort en moi fait partie de moi. Lui et moi on est en train de réaliser le rêve de tout amant : devenir un.

"Ma première nuit d'amour. C'est splendide, j'ai l'impression d'être au paradis. Je ressens l'aimer, je le lui dis. Il est heureux, il dit qu'il m'aime depuis toujours. C'est moi qui le rends heureux et cela me remplit de joie. J'aime sentir son désir. Sa tendresse, sa passion me conquièrent, je me laisse guider à travers les chemins de l'amour. Je veux fusionner avec lui..."

"Oui, je te comprends. Moi aussi je l'ai essayé. Je crois que les corps veulent s'unir parce que les âmes veulent se fondre..."

"T'as absolument raison. Deux âmes ne peuvent communiquer que par éclairs, en des moments d'intensité particulière et le rapport sexuel fait par amour parfois le permet.

"Le lendemain matin, quand nous nous réveillons, il me propose d'être son garçon. J'accepte immédiatement, sans hésitation. Au cours des mois passés ensemble avant cette nuit, il m'avait transformé, m'avait amené à m'accepter moi-même, mon amour et son amour. Voici comment notre histoire commence. Une seule chose brouille parfois notre relation : j'aimerais vivre avec lui, mais il ne veut pas. Pourtant, je sais qu'il m'aime. Le fait est qu'il ne veut pas m'impliquer : même si je ne le sais pas encore, faisant partie de l'IRA, il mène une vie très dangereuse..."

"S'il t'aimait vraiment, il aurait dû te le dire, pas vrai ?"

"Je ne sais pas, je ne suis pas lui... En tout cas, même sans comprendre, j'accepte. Je l'aime de tout mon être."

"Tu ne l'as jamais trompé, je parie."

"Non, bien sûr, ça ne me vient même pas à l'esprit : pour moi n'existe que lui seul. Tous les autres sont simplement... d'autres. Ils peuvent aussi me plaire, je peux me sentir bien avec eux en tant qu'amis, mais l'idée de pouvoir entretenir une relation avec d'autres ne me touche jamais."

"J'ai beaucoup aimé Carlo, et pourtant la tentation était parfois présente. Et deux fois je l'ai même trahi, même si après j'en étais désolé. Je ne voulais pas, mais..."

"Chacun de nous est différent, n'est-ce pas ?"

"Cela dépendra de mon âme." dit Eugenio en souriant.

"Non. Lorsque l'âme est dans un corps, elle se fond complètement avec celui-ci et ce qui en résulte est quelque chose de complètement nouveau et original. Et aujourd'hui, moi, c'est tout ce que j'ai été, peux-tu me comprendre ? Mais je m'incarnerai encore et j'aurai des expériences complètement nouvelles et différentes. Tous mes «moi» n'ont pas été fidèles... La fidélité spontanée, me semble-t-il, c'est quelque chose de plutôt rare."

"Continue. Tu étais avec Nick..."

"Oui, alors, je suis avec Nick et..."

"Mais pourquoi parles-tu toujours au présent ? C'est quoi, le présent historique, de narration ? Question de style littéraire ?"

"Non, pour moi les souvenirs sont comme la réalité, comme dans un film, je suis de temps en temps tous mes personnages : il me vient spontané de parler au présent. Quand une âme est incarnée, elle vit dans le temps, là où il y a présent, passé, futur, mais ce n'est qu'une illusion de cette entité corps-âme. Le corps vit dans le temps."

"Oui, d'accord. Trop difficile. Continue plutôt."

"Si tu ne m'interromps pas toujours... Alors, je suis vraiment bien. Je suis très bien avec Nick. Même si je suis protestant et qu'il est catholique, je suis gallois et il est irlandais, rien ne nous divise."

"Comment faisiez-vous avec la religion, au fait ? Il me semble que ni les protestants ni les catholiques ne sont tendres avec les homosexuels, n'est-ce pas ? Votre conscience se sentait-elle bien ?"

"Oui. Lui et moi avons fait comme une scission en nous entre la foi en Dieu et la prédication de nos églises. Nous n'avons pas de problèmes. Nous savons que l'amour qui nous unit est sacré, nous le vivons donc sans problèmes. Chaque église prêche des choses différentes, parfois opposées. Donc, c'est faillible, même si on dit le contraire. C'est ma conviction aussi bien que celle de Nick."

"Et maintenant, comme âme ?"

"Pas très différent, peut-être plus articulée. Mais veux-tu parler de théologie et de moralité ou de John ?"

"Hu, que t'es impatient, susceptible !"

"Non, une âme n'est ni impatiente ni susceptible, mais je ne comprends pas de quoi tu veux vraiment parler."

"De John, j'aime bien comme tu racontes."

"OK. Donc tout va bien. J'imagine déjà une longue vie sereine, ensemble, car je sais que, même si nous ne sommes pas liés par un rituel, nous le sommes et pour toujours. Il est mon mari, je suis le sien. Donc je suis heureux. Quand on peut être ensemble, quelques heures ou des journées entières, pour moi c'est la fête, le paradis. Il me suffit de le regarder juste dans ses yeux, y lire son amour pour moi, pour me sentir tout fondre. Il suffit qu'il m'effleure, que je sente le désir dans ses doigts pour vouloir être le sien. J'aime sentir son désir, le déshabiller, être déshabillé par lui. J'aime les longues préliminaires, le désir grandissant mais contrôlé, le goût, l'odeur, la consistance de son membre qui danse entre mes lèvres, la chaleur de ses lèvres sur mon membre, le plaisir que nous nous donnons à pleines mains, tant que nous ne pouvons plus résister et que je l'invoque pour qu'il me prenne, oh, sans paroles, et il finit par entrer en moi et avec sa fraiche impétuosité virile il me fait sentir que je suis tout à lui.

"Nous passons un temps merveilleux, qui ne cesse de m'étonner pour l'intensité et pour la complétude de nos émotions. Je me sens pleinement homme, pleinement réalisé, heureux, en un mot. Mais un jour, alors que je regarde la télévision en l'attendant, j'entends qu'il y avait eu un affrontement entre la police et l'IRA, non loin de l'église de Saint Martin aux Champs, et que l'IRA a laissé trois morts au sol : la TV en dit les noms... un c'est Nick! Lui, mon Nick, est mort ! Tué. J'ai envie de mourir.

"Ma vie, tout à coup, n'a plus de sens. Je ne pense pas à me suicider, cela ne fait pas partie de mes schémas mentaux, mais je me demande pourquoi continuer à vivre et je prie Dieu de m'appeler à lui et de me réunir à mon Nick. Je travaille, puis je m'enferme chez moi. Plus rien ne m'intéresse, plus personne. Seul le doux souvenir de Nick. Et enfin, le 12 novembre 1994, alors que je testais mon énième téléphone portable, une apoplexie arrête mon cœur.

"Et ainsi je me détache du corps qui fut de John et je suis entré dans ce téléphone portable."

"Et maintenant tu parles avec moi. Eh bien, qui que tu sois, t'as une belle fantaisie. J'aime comment tu construis tes histoires."

"Tu ne me crois toujours pas, hein ? Bof, ce n'est pas que pour moi ça change quelque chose. Tu ne me crois pas mais tu me parles..."

"Et toi, mon âme, pourquoi me parlerais-tu ?"

'Parce que ça m'amuse de pouvoir le faire. Je n'avais jamais pu le faire auparavant, mais maintenant, grâce à la technologie moderne... Et puis ça m'amuse que tu ne me crois pas, sais-tu ?"

"Ça t'amuse ? Les âmes s'amusent-elles aussi ?"

"J'utilise des mots que tu comprends, des concepts que tu comprends et que je connais, bêta. Sais-tu que t'es un gars sympa ? J'aurais aimé être ton âme... mais alors tu aurais été différent de ce que tu es..."

"Écoute, je dois te quitter maintenant. Est-ce que nous reparlerons ?"

"Quand tu veux, tant que je dois rester dans ce téléphone."

"Quel numéro dois-je faire pour te parler ?"

"Numéro ? Ne sois pas stupide : à tout moment, ouvre simplement le téléphone et dis-moi que tu veux me parler, non ?"

"Ouais, une âme ne dort pas, je suppose." dit Eugenio avec ironie : "À plus, âme. Maintenant, j'ai quelque chose à faire.

"À plus, Eugenio..."

Le jeune homme raccrocha et se demanda qui était ce bel esprit qui s'amusait ainsi. Un contact téléphonique... ou quelqu'un qui savait comment s'insérer dans une ligne... et qui aurait trouvé un passe-temps original. En tout cas, ça avait été amusant.



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