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histore originale par Andrej Koymasky


VIE SECRÈTE D'UN MUSICIEN CHAPITRE 6
UNE DAME LARGE D'ESPRIT

Pour Niklos commença une période étrange, dans laquelle il se sentait divisé en deux. Une partie de lui était en train de tomber de plus en plus amoureuse du garçon italien, un autre méprisait et détestait de plus en plus Berthold. Le garçon ne réussissait pas à se libérer très souvent, mais dès qu'il le pouvait il courait voir Niklos, vers l'heure du déjeuner et les deux faisaient l'amour.

Les soirs où Berthold profitait de lui, Niklos sentait grandir le dégoût en lui et, après des années, il pleurait à nouveau souvent en silence. Parfois, il avait même des pensées meurtrières... Il voulait s'échapper, fuir aux extrémités du monde avec Bruno, le plus loin possible de l'impresario.

Berthold, malgré son insensibilité, réalisa un changement dans son «protégé». Il essaya de comprendre ce qui se passait, essaya de sonder Niklos, de le faire parler, mais le jeune compositeur ne cessait de répéter qu'il n'y avait rien, seulement qu'il se sentait fatigué, qu'il avait souvent mal à la tête...

Bien que, au palais de la princesse Franziska Carla Josepha von Horstemberg-Windischgraetz, Bruno et Niklos fassent semblant de s'ignorer, et ils y réussissaient très bien, surtout Bruno, Berthold était de plus en plus soupçonneux et inquiet. Il sentait que le jeune compositeur hongrois, après dix ans de domination absolue, était en train de lui échapper.

Ce n'étaient pas des soupçons concrets, c'était plus quelque chose d'instinctif, l'instinct de l'animal de proie qui se sent échapper sa victime.

Bruno était revenu chez Niklos juste après l'heure du déjeuner. Comme ils faisaient par prudence, Bruno laissa ses vêtements dans le placard de bain sur le balcon, puis il alla sur le lit où Niklos l'attendait avec un plaisir croissant et amour.

"Mon amour, tu m'as dit que ton contrat avec Willibald va bientôt expirer, n'est-ce pas?"

"Oui, avec mon dernier concert au palais de la princesse..."

"Bon. Ne signe plus rien avec lui. Je suis en train de m'organiser pour laisser Vienne, comme je t'avais dit."

"Mais, Bruno, en es-tu sûr ? Laisser tout... Je..." Lui dit en hésitant Niklos, en le caressant.

"Tu ne dois pas tout laisser. Nous allons enlever toutes tes choses. Et je vais te trouver de nouvelles écritures où nous irons. Je t'ai dit que je suis en train de tout organiser, non ?"

"Mais où irons-nous ? Et pour transférer mes choses, surtout mes livres et mes partitions, et pour voyager, ça coûtera cher et tu sais que je n'ai pas d'argent."

"Nous prendrons tout d'ici. Ça coûtera un peu plus. Et je suis à la recherche de l'argent nécessaire, ne t'inquiètes de rien." Dit Bruno, en l'embrassant et en frottant son beau corps nu contre celui de l'amant.

"Mais où irons-nous ?" Lui demanda Niklos.

"À Trieste, pour le moment. Mon vieil ami m'a répondu, me disant que je peux envoyer tout chez lui, pour le moment."

"Willibald fera tout pour ne pas me laisser partir... et il est puissant..."

"Mais toi, veux-tu renoncer à tout et rester avec lui, ou veux-tu venir avec moi ?" Lui demanda Bruno, en le caressant.

"Non, je le déteste ! Je voudrais venir avec toi ailleurs."

"Et alors, mon amour ? Je t'ai dit de ne te soucier de rien, non ? Fais-moi confiance."

"Oui... Je te fais confiance, mais..."

"Tais-toi..." lui dit doucement Bruno, et il l'embrassa à nouveau.

"Prends-moi, amour, j'ai besoin de toi..." murmura Niklos.

Bruno lui sourit et se disposa pour s'unir de nouveau avec le jeune homme qu'il aimait. Il était sur le point de le prendre quand ils entendirent un bruit de pas montant l'escalier.

"Mon Dieu! C'est Willibald !" Chuchota Niklos effrayé.

Les deux sautèrent hors du lit et Bruno, rapidement, alla au balcon et s'enferma dans la cabine de bain. Niklos venait de fermer la porte sur le balcon et était sur le point de revenir sur le lit, quand derrière lui la porte s'ouvrit.

La voix de Berthold dit, sec : "Que fais-tu tout nu ?" et sa main saisit le bras du compositeur, le faisant tourner.

Niklos, d'une voix tremblante, lui dit : "Vous me l'aviez dit, vous, monsieur, que ici, dans la maison vous voulez toujours me trouver nu..."

L'homme sourit et hocha la tête : "Ben, oui, c'est vrai... tu m'attendais donc, hein ?"

"Non, monsieur, vous n'êtes jamais venu à cette heure... mais ne sachant pas quand vous décidez de venir ici, j'ai pris l'habitude de toujours être nu..." dit Niklos, tremblant légèrement, dans l'espoir que l'homme le croie et n'aille pas contrôler les autres pièces.

"Donc, tu es toujours prêt à prendre ma bite dans ton cul. Très bien. Étends-toi sur le lit, alors, j'ai juste envie de t'enculer."

Niklos aurait voulu l'éviter, mais il craignait s'il le faisait, de rendre l'homme suspicieux. Donc, il obéit et se coucha sur le ventre, écartant les jambes. L'homme, en ouvrant ses vêtements, s'approcha du lit et commença à taquiner le jeune homme entre les fesses, à les lui palper, et il lui poussa un doigt dans le trou.

"Niklos, bien que dix ans soient passés depuis la première fois, tu continues à me plaire beaucoup. Ton corps est resté glabre et lisse comme alors. Baiser ton beau cul est toujours un vrai plaisir. Tu m'appartiens maintenant, garçon, tu es à moi corps et âme. Tu es à moi, à moi seul, ne l'oublie jamais !"

"Comment pourrais-je l'oublier, monsieur ? Vous me le confirmez toujours et avec force, avec votre outil !"

L'homme se mit à rire : "Oui, tu as raison : chaque fois que je te baise je mets mon sceau sur toi ! Un sceau de chair sur un document de chair ! Et ma semence est la cire à cacheter qui témoigne que tu m'appartiens ! Écarte bien tes fesses, je veux te marquer de nouveau ! Ah, Niklos, tu es mieux qu'une putain, toi ! Toujours prêt à être baisé par un vrai homme."

Willibald était monté sur le grand lit, et il descendit sur lui, en l'enfilant avec une seule forte poussée. Puis il se mit à lui battre dedans avec son énergie coutumière.

Niklos le sentait s'agiter sur lui, en lui, l'entendit haleter et gémir avec sa voix enrouée, et il se sentit plus que jamais détester l'homme qui le montait comme un taureau monte une vache... Cette fois il le détestait plus que jamais parce que quelques instants avant il était là, sur ce même lit, mais entre les bras du garçon dont il était tombé amoureux et qui l'aimait.

Finalement, l'homme avec des poussées forcenées et gémissantes, déchargea à l'intérieur de lui. Puis il descendit du lit, Niklos le nettoya, et l'homme partit sans le saluer, comme il faisait souvent. Mais sur la porte, il se retourna et le regarda avec une expression dure.

"Rappelle-toi, Niklos, je te garde à l'œil. Tu es à moi, et tu vas rester à moi jusqu'à ce que j'aille renoncer à toi. Ne l'oublie jamais !" et il sortit.

Quand Niklos entendit la porte d'en bas se fermer, il sortit du lit, vérifia par sécurité que l'homme était vraiment sorti, en regardant dans l'escalier, puis alla sur le balcon pour ouvrir la porte du cabinet. Elle était verrouillée de l'intérieur. Il frappa légèrement.

"C'est moi, Bruno... il est parti..." murmura.

La porte s'ouvrit. "Il ne s'en allait jamais, le cochon !" s'exclama le jeune valet. Puis il vit l'expression bouleversée de son amant, alors il sortit et le prit entre ses bras, en le serrant à lui.

"Emmène moi sur le lit, mon amour... fais moi tien..." Sanglota Niklos, se cramponnant à lui.

"Mon amour... après celui-là..."

"Justement pour ça, j'en ai besoin. J'ai besoin de toi, Bruno ! Je t'en prie..."

"Tu n'as pas besoin de me prier, mon amour..." lui dit le garçon avec douceur.

Il le guida jusqu'au lit, il y monta avec Niklos, l'enlaça étroitement et l'embrassa.

"Prends-moi, Bruno. Je suis à toi, pas à ce... à ce..."

"Oui, mon amour, oui. Tu es à moi comme je suis à toi... viens, mon amour..." murmura Bruno, et enfin le prit.

"Oui... oui... ainsi... oh, mon amour... plus fort... chasse de moi sa mémoire, sa présence... oh, Bruno... mon amour..." gémissait le jeune homme, excité et plein de joie et de plaisir de pouvoir enfin faire l'amour.

Ils firent l'amour plus longtemps que d'habitude, jusqu'à ce que Bruno sente que son bien-aimé s'était un peu rasséréné. Puis, après que les deux furent assouvis, Bruno le serra entre ses bras et ses jambes, presque en le berçant, il resta longtemps encore avec lui.

"Oui, Bruno, je te prie... emmène-moi loin d'ici bientôt ! Même au prix de tout perdre, toutes mes choses..."

"Tu ne perdras rien, mon amour. Tu verras que bientôt... bientôt tu seras libre."

"Et je serai à toi seul."

"Tu es déjà à moi seul, mon amour. Mais bientôt personne ne pourra plus te toucher, ça je te le jure. Crois-moi, mon bien-aimé."

Bruno quitta la maison et revint rapidement au palais. De voir comment son Niklos était choqué par la visite de l'imprésario, lui avait fait sentir une peine profonde. Il devait tenter le tout pour tout.

Le matin suivant, la livrée mise, Bruno alla demander au maître de maison si la princesse était dans le palais. Sachant qu'elle était dans le salon lilas en train de lire, il alla hardiment frapper à la porte.

"Entrez..." répondit la voix de contralto de la princesse de l'intérieur.

"Pardonnez-moi si j'ose vous déranger, princesse..." dit Bruno entrant et s'inclinant.

"Oh, mon jeune et beau valet italien... Viens plus près, Bruno Leopoldo... Qu'est-ce qui te mène ici ?" Demanda la dame en appuyant le livre sur ses genoux.

La dame était assise sur un petit sommier, vêtue d'une robe couleur vert feuille morte avec une grande crinoline à quatre volants, et un ample décolleté orné d'un triple tour de petites perles noires, parfaites. Ses cheveux blancs étaient tirés en arrière et arrêté par un ruban de dentelle et des broches avec des grappes de perles noires.

Bruno s'arrêta, debout dans une attitude respectueuse, en face de la vieille dame.

"Pardonnez-moi, princesse, si j'ose vous déranger, mais je suis venu implorer votre aide."

"Implorer... C'est donc un sujet si grave ?"

"Oui, princesse. Si vous avez la patience et la bonté de m'écouter, à la fin vous pouvez disposer de moi comme vous le souhaitez : vous pouvez me faire enfermer en prison, m'ordonner de ne pas vous importuner encore et tout oublier... ou m'accorder l'aide que je suis venu implorer."

La dame, frappée par le ton sérieux et intense de son valet, qu'elle savait être normalement joyeux et insouciant, pencha un peu en avant le torse et lui dit : "Prends ce tabouret et assieds toi ici, Bruno. Et essaye de me dire ce qui te préoccupe tant. Je t'écouterai... puis je déciderai laquelle des trois solutions que tu viens me proposer sera naguère la bonne que je prenne." Dit-elle d'un ton condescendant.

"Votre grâce... Je sais avoir violé la loi..." commença le beau valet, tendu mais déterminé.

"As-tu volé ?" l'interrompit la dame, en levant un sourcil, surprise.

"Non, votre grâce. Je n'ai jamais rien volé, ni tué, ni fraudé personne. Mais parmi les milliers de lois... je sais qu'il y en a une qui me condamne..."

"Oh... mon garçon... Il y en aurait au moins un couple qui me condamnent moi aussi, vu l'enchevêtrement de lois que notre Empire a accumulées depuis des générations, sans jamais nettoyer dans sa propre maison..." dit la vieille femme avec un léger sourire. "Quelle serait donc la loi que tu as violé, en dépit de ton jeune âge ?"

"Je... vous voyez... j'aime un homme !" dit tout d'un souffle le garçon.

La princesse se pencha de nouveau en arrière contre le dossier, en se portant la main diaphane sur la poitrine : "C'est tout ? Eh bien oui, tu as violé la loi, mais si pour cela... mais si tu devais être mis en prison... les prisons de notre empereur ne seraient pas suffisantes pour héberger tous ceux qui devraient t'y tenir compagnie... dont plusieurs membres même de la cour impériale. Garçon, si tel est ton problème... tu peux dormir sur tes deux oreilles. Il suffit que tu ne fasses pas de scandale, Bruno Leopoldo, et tu peux continuer à vivre en paix ta vie avec l'homme que tu aimes."

"Votre grâce pardonnez-moi, mais... ce n'est que le début de ce que je suis venu soumettre à votre compréhension..."

"Ah. Continues, alors."

"Vous connaissez très bien l'homme que j'aime... et qui m'aime..."

"Quelqu'un de cette maison ? Quelqu'un de ma famille ?" demanda d'une voix tranquille, la dame.

"Non, princesse... quelqu'un qui la fréquente... tous les quinze jours, à l'occasion de vos fêtes et de vos réceptions de musique."

"Un de mes hôtes, alors."

"On pourrait ainsi dire... J'hésite à dire son nom : si ce que je voudrais vous dire doit susciter votre colère... je ne voudrais pas que lui aussi en ait à souffrir... parce que... parce que c'est moi qui l'ai séduit... "

"Est-ce que je te semble dédaigneuse, Bruno Leopoldo ? Non, allons... En ce qui concerne le fait que tu l'aies séduit, qui que soit ce gentilhomme... ça ne m'étonne pas du tout : tu es un garçon bien séduisant. Tu peux me dire sans aucune crainte son nom."

"C'est... le compositeur hongrois qui..."

"Oh, le jeune Niklos Sebestyen Jusztin Tétény ! Un très beau jeune homme lui aussi, oui... je comprends maintenant pourquoi je ne l'ai jamais vu courtiser aucune de mes hôtes... Vous êtes amoureux, donc ?"

"Oui, votre grâce, depuis quelques mois..."

"Je me félicite pour toi, pour vous. Mais je ne vois pas encore le problème, Bruno Leopoldo." dit la dame d'un ton léger.

"Le problème, votre grâce... s'appelle Berthold Willibald."

"L'imprésario ? Il a découvert votre «affaire» et il vous menace ?"

"Non, Dieu merci, il ne le soupçonne même pas. Le fait est, princesse, que l'homme... comment le dire sans utiliser des termes grossiers... l'homme... a forcé monsieur Tétény à... succomber à... ses désirs."

"Oh ! Forcé, tu me dis ?" demanda la dame, couvrant ses lèvres avec sa main parée de bijoux. "Tu veux dire qu'il le soumet... à des pratiques... dégradantes ?"

"Il en est ainsi, votre grâce..." dit le jeune valet et lui raconta de la façon dont il s'était caché dans le cabinet de bain de la chambre de Niklos alors que l'imprésario pour la énième fois profitait du jeune compositeur.

Puis il conclut : "Quand Niklos... monsieur Tétény, avait dix-sept ans, il lui a fait signer un contrat dans lequel le jeune compositeur lui permettait d'administrer ses gains et se liait à lui pour dix ans. Maintenant... monsieur Tétény aimerait se libérer de ce contrat, qui d'autre part va expirer et... et quitter Vienne avec moi. Mais ni monsieur Tétény ni moi avons de l'argent... et s'il essayait de partir ainsi, il risquerait de perdre toutes ses affaires, en particulier les partitions, les livres, le piano..."

"Je comprends. L'imprésario ne veut pas le laisser aller et si ton hongrois... s'il essayait de se rebeller, il le dépouillerait aussi de ce qui est à lui..."

"Pour monsieur Tétény, bien qu'il serait prêt à tout perdre pour fuir avec moi... vous voyez, la musique est sa vie, ses partitions... les perdre pour lui serait comme... comme perdre un fils..."

"Oui, je comprends, Bruno Leopoldo. Oui, ce jeune homme a manifestement du talent, il pourrait recommencer ailleurs, mais... tu as fait une bonne comparaison : il serait douloureux pour lui, comme pour une mère de perdre ses propres fils. Il serait prêt de toute façon à... s'enfuir avec toi ?"

"Je ne peux pas lui demander cela, en effet, je ne peux même pas supporter son horrible situation. Mais qu'est-ce que je peux, moi, un humble valet ? J'ai à peine réussi à économiser un peu d'argent pour payer le voyage pour monsieur Tétény et pour moi..."

"Eh, oui. Et où voulez-vous aller ?"

"À Trieste j'ai une connaissance ancienne qui, au moins temporairement, pourrait nous accueillir. Puis on trouvera quelque chose..."

"Donc tu as besoin d'argent, si j'ai bien compris." demanda la dame avec un léger sourire.

"Si ma hardiesse ne dépasses pas les limites de la décence, votre grâce..."

"Mais en même temps, tu as besoin d'aide pour permettre à ton monsieur Tétény d'apporter avec lui tout ce qui lui appartient, non ?"

"Oui, votre grâce."

"Et donc, non seulement une aide financière, mais aussi une aide pour qu'il puisse garder ce qui lui appartient, non ?"

"Oui, votre grâce."

"Cet imprésario... monsieur Berthold Willibald... il semblait une personne tellement comme il faut, et par contre... Maintenant, je comprends aussi la profonde tristesse qui voile toujours son regard, le visage, la musique de ce pauvre jeune homme. Eh bien, Bruno Leopoldo, vous aurez mon aide ! Va maintenant voir si monsieur le surintendant est au palais et dis lui de venir ici avec toi. Dépêche-toi !"

Bruno se leva, fit une révérence et murmura, plein de reconnaissance : "Je vous remercie, princesse. J'y vais."

Peu après, il revint avec l'intendant. Ils trouvèrent la princesse assise à la table du whist. La dame fit signe aux deux de s'asseoir.

"Von Fricken, vous devez immédiatement prendre ma voiture, celle avec le blason de famille, et aller où mon valet vous emmènera, accompagné par quatre de nos serviteurs et valets les plus robustes... En fait, prenez aussi le charriot des provisions : vous devez aller immédiatement faire un déménagement. Prenez avec vous aussi des boîtes et des sacs vides... que sais-je, tout ce qu'il faut, en somme. Vous prendrez tous les biens de monsieur Tétény, et aussi le jeune homme, et vous apporterez tout ici au palais. En outre, quand vous aurez tout fait, vous devrez vous occuper, toujours avec l'ici présent Bruno Leopoldo, pour expédier tout, à nos frais, à l'adresse qu'il vous indiquera. Entre-temps préparez le certificat de travail de Bruno Leopoldo et vous lui verserez... disons le salaire d'un an."

"Ce sera fait, princesse."

"Ah, et vous faites préparer une chambre pour monsieur Tétény. Une chambre dans l'aile des hôtes. Et à partir de maintenant jusqu'à la fin de son service avec nous, notre Bruno Leopoldo sera le... valet personnel de monsieur Tétény."

"Comme vous ordonnez, princesse."

"Allez préparer le tout, puis je vous enverrai Bruno Lepoldo pour vous guider..."

L'homme se leva, s'inclina et sortit. La dame se tourna vers le garçon : "Penses-tu que cela soit suffisant, Bruno Leopoldo ?"

Le garçon subitement prit la main que la dame avait placé sur la petite table et l'embrassa : "Je ne sais pas comment vous remercier, princesse. Votre générosité est... est... Je n'ai pas de mots..."

"Si tu n'as pas de mots, garçon, ne dis rien. Oui, c'est vrai, ce qu'il y a entre monsieur Tétény et toi, est contre la loi... mais..." puis dit-elle avec un sourire un peu espiègle, "c'est parfois agréable d'être en mesure de le faire, en roulant la loi. Une fois que vous serez réunis ici, le digne monsieur Berthold Willibald... n'osera rien faire, ou il aura à faire à moi. Après tout, ce n'est pas pour rien que je suis la cousine de l'impératrice ! Maintenant va. Et... tiens-moi au courant, garçon."

Bruno sortit heureux : il n'avait vraiment pas espéré autant. Il avait décidé de prendre le risque, sachant que la dame était large d'esprit, et avait eu beaucoup plus de ce qu'il espérait.

Peu de temps après, la grande porte du palais Horstemberg-Windischgraetz s'ouvrit et il en sortit la voiture de la princesse suivie par le charriot des provisions, avec quatre puissants serviteurs assis sur le siège du cocher ou debout sur le marchepied arrière de la voiture, en plus des deux conducteurs. Bruno leur avait demandé d'apporter aussi une boîte avec des outils.

Arrivés près de la vieille maison avec les fenêtres à croisée, ils firent stationner dans la voie le coche et le charriot, et Bruno accompagna l'intendant de la princesse jusqu'au grenier. Il frappa à la porte du troisième étage et attendit. Peu après descendit Niklos, qui avait mis en hâte une chemise et un pantalon et était pieds nus.

"Bruno..." s'exclama surpris le jeune compositeur, puis il vit l'homme qui accompagnait son amant et s'arrêta interdit.

"Laisse-nous entrer. Monsieur von Fricken, l'intendant de la princesse Franziska von Horstemberg-Windischgraetz, est venu avec des hommes et des charriots prendre toutes tes affaires et t'emmener au palais..."

"Non... je ne comprends pas..." dit Niklos, mais il se mit de côté et laissa monter les deux, en les suivant.

"Tu viendras vivre dans le palais, jusqu'à ce que nous puissions envoyer toutes tes affaires à Trieste, puis nous y irons aussi. Avec la protection de la princesse..." Lui expliqua le jeune valet, radieux.

"Mais... après le dîner monsieur Berthold Willibald pourrait venir ici, et certainement..." répondit perdu le compositeur.

"Si nous ne finissons pas à prendre tes affaires, Niklos, entre nous deux et les six hommes qui sont avec nous... Willibald pourra faire bien peu. Nous tâcherons de nous en aller avant que cela puisse arriver... et s'il vient ici, il trouvera tout désert. Dépêchons nous, allez ! Fais voir à monsieur l'intendant ce qu'il y a à emporter !"

Niklos, se sentant un peu étourdi, submergé par les événements, mais heureux à la perspective de pouvoir quitter sa prison, montra à l'intendant ce qu'il y avait à emporter.

"Même les meubles ?" Demanda von Fricken.

"Non, pas de meubles..." Niklos répondit.

"Mais le piano oui. Vous pouvez le démonter, n'est-ce pas ?" dit Bruno prêt.

"Oui... mais il faudra probablement l'accorder de nouveau..."répondit le compositeur.

"Nous le ferons accorder, une fois à Trieste."

"Il y a beaucoup moins que ce que je pensais." dit l'intendant. "Je fais monter les hommes avec les caisses, les sacs et la boîte à outils tout de suite, et nous commençons à transporter le tout en bas."

L'homme à peine sorti, Bruno prit Niklos entre ses bras: "Es-tu heureux, mon amour ?"

"Oui... Je suis... je suis ébahi. Je ne croyais pas que si vite... soudainement... Mais la princesse... pourquoi..."

"Je lui ai tout dit ! Et elle a décidé de nous aider. Elle fera tout livrer à Trieste, à ses frais. Elle t'accueillera au palais jusqu'au jour de notre départ, et elle me donnera le certificat de travail et le salaire entier d'un an !"

"Tu lui as tout dit? Tout de nous deux et même... même..."

"Oui. Elle sait que nous nous aimons et elle sait que le cochon profitait de toi, et qu'il te gardait entre ses mains. Et elle a décidé de nous aider. N'est-ce pas merveilleux ?" Demanda Bruno avec un sourire radieux.

"Oui, mon amour... seulement que... Mon Dieu, ça me semble encore incroyable..."

Ils entendirent des pas dans l'escalier et se séparèrent. L'intendant entra, suivi par les quatre serviteurs, leur montra tout ce qui était à emporter et commença à organiser le déménagement. Pendant que Niklos avec deux hommes commençaient à démonter le piano vertical, en protégeant les parties les plus délicates avec les couvertures du lit de Niklos, Bruno avec un homme enlevait des armoires tous les vêtements de Niklos et les mettait dans les sacs, et l'intendant avec un autre homme remplissait les caisses avec les partitions et les livres.

Ils travaillèrent tous très dur, montant et descendant les escaliers, chargeant le carrosse et le charriot, et l'intendant envoya les hommes, deux à la fois, tour à tour, avec Niklos, puis lui-même, puis Bruno, manger à l'auberge, tandis que les autres continuaient à exécuter le déménagement. À la moitié de l'après-midi le logement était vide. Niklos avec le violon à la main dans son étui et Bruno avec la flûte dans sa boîte, montèrent avec le surintendant sur le carrosse et rentrèrent tous au palais. Willibald ne s'était pas montré.

Alors que, dans la cour du palais les serviteurs déchargeaient tout sous la direction de l'intendant et mettaient tout dans un des entrepôts, un autre valet approcha Bruno.

"Bruno, la princesse attend monsieur le compositeur et toi, dans le petit salon blanc..."

"Oui, nous montons tout de suite." dit Bruno.

Comme ils montaient les escaliers, Niklos chuchota : "Bruno, nous devons rencontrer la princesse, maintenant ?"

"Certainement, et la remercier de tout. Puis, je vais te montrer ta chambre..."

"Mon dieu... J'ai honte... Elle sait tout, tu as dit... vraiment tout..."

"As-tu honte de moi ? De notre amour ?" lui demanda avec un sourire taquin le jeune italien.

"Non, oh non. Mais elle sait tout... et..."

"Et elle a décidé de nous aider, non ? Allons, bon courage !" Lui dit le garçon gaiement puis il ajouta doucement, "Si tu te sens... gêné, pense seulement combien je t'aime, combien tu m'aimes, et tu verras que tout ira bien."

"Oui, mon amour..." Murmura Niklos avec un timide doux sourire, et rougit.


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