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histore originale par Andrej Koymasky


LA SAINTE VIE
D'UN EVEQUE
PECHEUR
CHAPITRE 5
ANNÉES 26 ET 27
AMOUR SACRÉ ET PROFANE

Il s'avéra bien plus facile à Wilibert de faire preuve de clémence et de compréhension pour Liutpold et Godaliufs que de justifier ses propres tendances et attirances. Avant d'être évêque, jamais il ne s'était posé de telles questions. Il cueillait ça et là les fruits les plus savoureux sans y repenser à deux fois. Il ne faisait pas de mal, et jamais de violence, mais il prenait plaisir à ses rencontres sans se demander si c'était bien ou mal.

Mais à présent il se devait d'agir en cherchant à toujours faire de son mieux, à présent il se sentait obligé de ne plus agir que selon la justice et la vérité, pour autant qu'il le puisse, et envers les autres autant qu'envers lui-même.

Sans même s'en faire pour la loi humaine, qu'en son fief au moins il pouvait dicter lui-même, en homme d'église qu'il était malgré lui, pouvait-il désobéir à la loi de l'Église dont il était le pasteur, voire à Dieu en personne?

Plus il connaissait Waldemar, plus il s'en sentait amoureux, sans compter qu'il avait pour lui de plus en plus de désir. Mais si son amour pour lui croissait de jour en jour, ce qui n'avait rien de défendu, pouvait-il se permettre de lui offrir cet amour de façon charnelle, comme tout son être y aspirait de plus en plus ?

Il avait eu l'occasion, par deux ou trois fois, d'admirer le corps merveilleux de ce garçon quand il se baignait sous ses balcons. Il l'avait observé, très attentivement, pendant les cours et il se sentait attiré par lui de plus en plus puissamment.

Alors, pouvait-il révéler au beau Waldemar son amour obsessif ? Et si jamais le garçon partageait son amour, pourrait-il partager son lit tout en restant digne évêque de l'église, tout en restant, en fait, dans l'Eglise?

Tout en lui criait "oui", son cœur, son âme et son corps lui criaient que c'était possible. Seul son esprit hésitait encore.

Un feu brûlait en lui : devait-il faire le nécessaire pour attirer ce garçon vers lui, tout mettre en œuvre pour le faire céder ou prendre ses distances, éteindre l'incendie à grande eau dans l'espoir de l'épargner? Devait-il se rapprocher de lui ou prendre ses distances ?

"Qu'il s'embrase : il me détruira ou il me réchauffera. Il sera l'enfer ou le paradis. Je ne suis pas fait pour les limbes et mon purgatoire a déjà bien trop duré." se dit-il en conclusion.

Il se leva et descendit à la schola.

Il entra dans la pièce où Waldemar avait cours. Le magister apprenait les Saintes Ecritures aux garçons, il interrompit le cours et tout le monde se leva.

"Pardon d'interrompre ton cours, magister. Ton élève Waldemar doit venir avec moi." dit-il d'un ton décidé.

"Dois-je emmener mes affaires avec moi, Monseigneur ?" demanda le garçon, surpris.

"Non, laisse-les là. Tu reviendras bientôt les chercher. Mais suis-moi."

Le garçon le suivit à l'évêché. Ils montèrent l'escalier extérieur et entrèrent dans l'antichambre puis dans la chambre de l'évêque où était le marque-temps et dont le balcon donnait sur le lac. Waldemar semblait intimidé.

"Assied-toi!" dit Wilibert presque durement. "D'ici peu tes études vont se terminer. As-tu choisi le sujet de ton allocution finale ?"

"Non, magister... Monseigneur..."

"Bien, alors j'en décide pour toi : amour sacré et amour profane."

"Le sujet est passionnant... mais loin d'être simple."

"J'ai décidé que tu seras mon chancelier privé. Aussi, quand tu auras pris les ordres mineurs, il te faudra continuer un temps tes études et épauler mon actuel chancelier qu'un jour tu remplaceras, lorsqu'il t'aura suffisamment formé. D'ici là tu auras pris les ordres majeurs.

"Après la Schola, tu emporteras tes affaires ici et tu logeras à l'évêché. Je te ferai installer une chambre. Quand tu seras prêt, je promouvrai mon chancelier actuel à une charge plus honorifique et tu prendras définitivement sa place. Ah... et tu seras le dernier de ta classe à prononcer l'allocution à la cathédrale."

Wilibert continua à parler, mélangeant différents sujets, se répétant parfois, il parlait sans s'arrêter parce que pendant qu'il abordait chaque sujet, une seule pensée se formait dans sa tête. L'évêque, par ce torrent de mots, tentait d'arrêter cette pensée précise, jusqu'à ce qu'il ne soit plus capable de la retenir.

"Je veux que tu sois mon..." dit-il et, pour rattraper ce qui venait de lui échapper, il ajouta précipitamment : "... chancelier privé. Tu seras toujours à mes côtés, pour m'assister en tout..." et, égaré dans les yeux noirs et profond de ce beau garçon, il se tut enfin.

Waldemar prit la parole, d'un ton grave : "Vous me faites là un grand honneur, ô mon évêque et seigneur. Je serai votre... serviteur et je serai toujours à vos côtés... pour tout ce que vous pourriez désirer. Je ferai de mon mieux pour vous satisfaire de toutes les manières que je connaisse et qui soient en mon pouvoir. J'espère savoir toujours vous donner tout ce que vous attendrez de moi..."

Wilibert se leva et le garçon fut aussitôt debout lui aussi. Le jeune seigneur vint devant lui, le prit par les bras, le serra contre lui et l'embrassa sur la bouche. Puis il s'écarta et dit, d'une voix basse et grave : "Cela aussi, Waldemar ? Cela aussi tu es prêt à me le donner ? Comprends-tu ce que je te demande ? Ce n'est pas l'évêque, Waldemar, ce n'est pas le comte. C'est l'homme ! Es-tu prêt à cela ?"

Waldemar se mit à genoux devant lui et baissa la tête en signe de soumission.

"Ce n'est pas le clerc qui parle, ni le sujet qui répond. Ce n'est que le garçon qui a eu l'effronterie de sauter plusieurs fois le mur de la schola pour venir se baigner juste sous ton balcon, dans l'espoir que tu y viennes et que tu poses ton regard sur lui. Dans l'espoir que tu me fasses signe pour me dire : viens ! Et me voici enfin ici, en ta présence, et je t'implore : fais-moi tien, de toutes les manières qui t'agréeront."

Wilibert se mit à genoux devant lui, prit son menton dans ses mains et lui fit relever la tête.

D'une voix rauque d'émotion, il lui dit : "C'est vrai ? C'est pour ça que tu venais là ? Tu veux vraiment être à moi ?"

"Depuis le premier jour où tu es venu à la schola pour enseigner, mon âme et mon cœur n'ont aspiré qu'à cela. J'ai prié nuit et jour que mon rêve hardi puisse devenir réalité."

"Mais sais-tu, Waldemar, que si tu devenais mien, nous vivrions tous deux dans le péché ?"

"Si te donner mon amour et mon corps est pécher... alors nous brûlerons ensemble en enfer. Mais si ce n'est pas pécher, je connaîtrai le paradis sur terre, avec toi. Fais-moi tien, Wilibert, fais-moi tien."

"Mais as-tu déjà eu des expériences... avec des femmes ou des hommes, Waldemar ?"

"Aucune. Ma chair est encore vierge. Il n'en est pas moins vrai qu'elle aspire à être tienne."

"Tu sais que le bûcher nous attend si notre amour était découvert ?"

"Je sais. Mais je préfère risquer qu'un jour mon corps soit brûlé sur le bûcher, plutôt que continuer à me consumer pour toi sans espoir."

"Et sais-tu, Waldemar, qu'une telle union... qu'il peut être douloureux, les premières fois, d'être pénétré, pour un garçon vierge ?"

"Non, je l'ignorais. Mais je sais que toute nouvelle vie ne peut naître que dans la doleur. Et je sais aussi qu'après, ma joie sera telle que la douleur sera vite oubliée et bénie."

"Waldemar... tout mon corps s'enflamme pour toi..."

"Et moi j'éprouve pour toi une chaleur si forte, nouvelle, plus belle et grande que tout ce que j'ai jamais éprouvé. Fais-moi tien, Wilibert, je t'en prie."

"Ne serait-il pas plus sage... il est encore temps de se reprendre et d'y repenser... d'en reparler... d'y penser plus avant..."

"Je me sens fou pour l'instant, pas sage ! Fou de toi ! Prends-moi, fais-moi tien..." le supplia le garçon.

"Mais je... je ne veux pas que ton corps, mon garçon, j'attends tout de toi : ton cœur, ton esprit, ton âme, ton souffle... tout. Je veux ton amour, parce que je t'aime."

"Et tu l'as, pur et sans tache. Amour sacré et amour profane, tel est le thème que tu m'as donné. Ou l'amour est sacré ou il n'est pas amour, alors... Tu viens de me dire que tu veux me donner ton amour, que tu veux le mien... Je suis tout à toi. Prends-moi !"

Wilibert fit doucement se relever le garçon, en se levant avec lui. Puis il le prit par la main. Une lueur pure et intense brillait à présent dans le regard de Waldemar, si différente de la concupiscence qu'il avait vu dans le regard d'autres garçons qu'il convoitait.

Il l'attira contre lui et l'embrassa profondément, longuement. Waldemar se serrait contre lui. Il sentit la fougueuse virilité du garçon se presser contre lui et chercher la sienne. Le garçon tremblait de tout son corps.

"Prends-moi, je t'en prie..." le supplia Waldemar quand leurs lèvres brûlantes se séparèrent, "fais-moi tien."

Wilibert l'emmena jusqu'à sa chambre, toute proche, puis à son lit. Il lui enleva tous ses habits, le prit dans ses bras puissants et le déposa sur le lit et il regarda, enfin de près, ses belles formes et son membre qu'il vit pour la première fois dressé et vibrant pour lui... Il se déshabilla à son tour et enfin il s'allongea sur lui et le fit sien.

Quand la passion qui les consumait tous deux fut temporairement apaisée, mais loin d'être éteinte, Waldemar murmura, le regard brillant et heureux : "Merci, Wilibert, merci..."

"Je ne t'ai pas fait trop mal ?"

"Pas trop. Et je le savais, la joie d'être enfin tien m'a fait bénir cette douleur. Que tu es beau et fort. Wilibert, mon seigneur et maître... pas seulement de par la loi, mais parce que mon cœur t'a couronné tel. Ta chair a béni la mienne."

"Je t'aime, Waldemar. Oui, par tous les saints, je t'aime !" murmura le jeune homme et une larme de joie vibra à ses yeux.

"Que fais-tu, seigneur, tu pleures ?" lui demanda le garçon en lui caressant la joue. Il prit la larme d'un doigt et la goûta.

"Si je ne pleurais pas, mon cœur éclaterait de trop de bonheur de t'avoir enfin dans mes bras."

"Tu me feras toujours dormir ici, dans ton lit avec toi ?"

"Chaque fois que ce sera possible sans éveiller de soupçons."

"Nous serons prudents, n'est-ce pas mon aimé seigneur ?"

"Oui, bien sûr, pour que personne ne puisse rompre cet enchantement. Connais-tu, Waldemar, la devise écrite sur mon blason, sous mes armoiries ?"

"Bien sûr : Ex Duobus Unum."

"Quand je l'ai choisi, j'ignorais encore qu'elle parlait de toi et moi..."

"Et le côté gauche de tes armoiries, le blanc, au centre, c'est ton épée dans mon anneau..." lui dit le garçon. "Mon nom de famille c'est Khreng, cela veut dire anneau. Encore un signe prémonitoire de notre amour."

"Oui ! C'était donc notre destin que je te rencontre..."

"... et me fasse tien."

Waldemar, du bout du doigt, traça quelques signes sur la large poitrine du jeune homme.

"Qu'écris-tu ?" lui demanda Wilibert.

"E.D.U. - les initiales de ta devise."

"Ne dis encore à personne que tu seras mon chancelier privé."

"Ton apprenti chancelier, pour l'instant. J'ignore encore si tu seras content de moi. Toutefois, bien sûr que je ne dirai rien."

"Je le dirai moi-même après avoir entendu ton allocution à la cathédrale."

"Comme tu voudras, ô maître choisi par mon cœur. Mais si tu n'es pas content de moi... me renverras-tu ?"

"À ton avis ?"

"Ce serait justice."

"Alors tâche de devenir un chancelier parfait."

"J'étudierai tout ce qui peut être étudié."

"Tu aimes étudier, n'est-ce pas ?"

"J'ai toujours beaucoup aimé, mais cela me plaira encore plus si c'est pour te faire plaisir."

"Quand tu logeras ici, tu pourras utiliser tout ce que contient ma bibliothèque personnelle, j'y ai fait apporter aussi les livres de la bibliothèque du comte. Bien, à présent rhabillons-nous, tu dois retourner à la schola et ne pas rater d'autres cours." dit-il avec une légère tape sur ses petites fesses fermes.

Lorsqu'il fut seul, l'évêque pensa à la joyeuse promptitude avec laquelle le garçon s'était donné à lui et à l'amour et l'attention avec laquelle il lui avait fait don de sa virginité. Waldemar n'était pas le premier qu'il dépucelait, mais les autres, il avait dû les amadouer, insister, ils se faisaient prier et immanquablement, ils insistaient sur le "sacrifice" de leur virginité, comme s'ils en exigeaient de la reconnaissance.

Pas Waldemar. Il s'était promptement donné à lui, il lui avait souri, il l'avait accepté avec joie malgré la douleur, et après il l'avait remercié d'avoir accepté de prendre sa virginité et son innocence. Le jeune homme en était très ému.

Il se sentait plus heureux et serein qu'il n'avait jamais été, et le cœur réchauffé par tant d'amour, il finit de s'habiller et descendit à son tour. Il pensa aller à la cathédrale pour remercier le Seigneur d'avoir permis qu'il ait l'amour de ce garçon, en plus de son corps. L'en remercier dans la chapelle privée de ses appartements lui parut inadéquat.

Mais arrivé sur la place, il fut arrêté par un mendiant. Il était à cet âge de la vie où l'on n'est plus un enfant mais pas encore un homme. Il était si maigre qu'on pouvait compter ses côtes, il portait des haillons qui couvraient mal son corps, mais il n'était pas sale et ne sentait pas mauvais. Il avait de grands yeux pleins de tristesse et de malheur.

Le garçon tendit une main tremblante et demanda d'une voix faible: "Pour l'amour de Dieu, comte-évêque, béni du Seigneur et de tous les hommes, ayez pitié de moi. Donnez-moi une petite pièce, pour m'acheter un peu de pain..."

"Comment t'appelles-tu, mon garçon ?" lui demanda Wilibert, le cœur serré par tant de misère chez un si jeune homme.

"Mon nom ?" demanda le garçon étonné, "Tout le monde m'appelle Pauvret, Monseigneur."

"Ce n'est pas un nom. Comment as-tu été baptisé ?"

"J'ai été baptisé Friedbalths, Monseigneur, mais c'est un nom à présent oublié par tout le monde."

"Et comment en es-tu venu à en être réduit à une telle misère ?"

"Les soldats du comte qui était notre seigneur [avant] toi ont tué mon père, il y a sept ans, parce qu'il avait tué une perdrix du domaine du comte pour nous faire manger ma mère et moi."

"Et ta mère, où est ta mère ?"

"Elle est au ciel... Elle est morte de chagrin quelques mois après qu'on a trouvé en forêt les restes de mon père pendu à un arbre et dévorés par les corbeaux..."

Wilibert frissonna : "Et qui a pris soin de toi ?"

"Personne. Je vis de l'aumône... Personne ne veut avoir dans les jambes un garçon trop petit et trop faible pour servir à quelque chose... Pouvez-vous me donner une petite pièce, Monseigneur ? J'ai faim..."

"Où habites-tu, mon garçon ?"

"Sous le ciel, Monseigneur."

"Viens avec moi, suis-moi." dit Wilibert d'un ton résolu.

Il le conduisit jusqu'aux aux cuisines de l'évêché et ordonna pour commencer aux serviteurs de donner au garçon un bon repas, puis de lui trouver une tunique et des sandales. Puis de le ramener devant lui. Le jeune évêque était très ému de tant de misère due à tant de cruauté.

Quand le garçon fut ramené devant lui, l'évêque lui dit : "C'en est fini de ta misère, Friedbaths. Je ne puis te rendre ni ton père ni ta mère... mais désormais tu travailleras pour moi."

"Je ne sais rien faire, Monseigneur..." protesta tristement le garçon.

"Tu as des yeux pour voir, des jambes pour marcher et une bouche pour parler. C'est là tout ce qu'il te faudra pour le travail que je te confie. Ici, à côté de l'évêché, il y a une petite maison où mes serviteurs gardent le bois à brûler et d'autres choses. Je les ferai mettre ailleurs. Ce sera ta maison et ton lieu de travail."

"Ma maison, Seigneur ? J'aurai une maison ?"

"Oui, tant que je serai satisfait de ton travail."

"Mais... que devrai-je faire, Seigneur ?"

"Il y a d'autres pauvres, comme toi..."

"Oh oui, beaucoup, Seigneur."

"Tu vas les chercher un à un, tu les emmèneras chez toi et tu leur donneras un repas et un habit, s'il le faut. Tu leur demanderas leur nom et la raison de leur misère ainsi que le travail qu'ils sauraient ou qu'ils pourraient faire."

"Un repas, Seigneur ? Et un habit ? Mais comment pourrais-je leur donner ça ?"

"Je ferai en sorte que tu aies assez de vivres pour toi et ceux que tu aides, et d'habits aussi. Après, s'ils sont capables d'un métier, une fois rassasiés et remis en selle, chaque fois que tu viendras m'en parler ou que mon représentant t'en parlera, nous tâcherons de leur trouver le travail qui leur permettra de gagner leur pain. Mais veille à écarter les fainéants et les profiteurs. Te sens-tu capable de faire ce travail pour moi ?"

Le garçon s'agenouilla et embrassa les pieds de l'évêque. "Seigneur, ton sujet fera comme tu as dit. Que tu sois mille fois béni."

"Relève-toi, Friedbalths. On ne se prosterne ainsi que devant Dieu..."

Wilibert appela son trésorier et son aumônier et leur ordonna que désormais les oboles reçues pour les pauvres à la cathédrale ne soient plus distribuées au hasard chaque dimanche après la messe mais soient utilisées pour tout ce que Friedbalths demanderait.

Le garçon s'acquitta bien de la tâche qui lui avait été confiée et les bénéficiaires de ses œuvres furent vite les premiers à l'aider, selon leurs moyens. Un jour apparut une enseigne à la porte de la maison où œuvrait et habitait le garçon, une main qui bénissait avec écrit dessous : "La main de l'évêque". Et c'est sous ce nom que fut désormais connue cette œuvre bienfaitrice.

Quelque mois plus tard, remarquant que Friedbalths ne venait plus lui présenter ses requêtes, Wilibert alla voir le garçon. Il trouva chez lui une vieille femme qui s'affairait aux fourneaux, une petite fille qui reprisait une tunique et deux petits garçons qui dormaient dans un coin.

"Evêque Wilibert, tu nous honores par ta présence." lui dit le garçon, joyeusement, en guise de salut.

Wilibert remarqua que le garçon s'était remplumé, mais aussi qu'il portait toujours la tunique qu'il lui avait donnée le jour où il l'avait rencontré.

"Tu t'es mis en famille, Friedbalths ?"

"Ils n'avaient nulle part où dormir, et ils sont tous trop faibles pour travailler, alors je partage ma maison avec eux... la maison que tu as daigné me donner." se corrigea le garçon en hâte.

"Et je vois que tu portes toujours cette vieille tunique. N'en as-tu pas d'autre ?"

"Comment pourrais-je en avoir deux quand ils sont tant à n'en avoir aucune ?" répondit le garçon avec simplicité.

"Ton enseigne ne ment pas, tu es vraiment la main de l'évêque !" s'exclama Wilibert, "Et tu fais fructifier le peu que je t'ai donné. Alors maintenant, exprime un désir, je veux te récompenser."

"Un désir, Seigneur ? Si seulement je pouvais avoir plus d'espace pour accueillir ceux qui sont sans toit et malades... et un petit jardin que même un gamin puisse entretenir sans peine... et une poule pour les œufs... Je te demande trop, seigneur ?

Wilibert sourit : "Oh non, bien trop peu, je le crains. Je te trouverai une maison plus digne et plus grande, avec un petit jardin et quelques bêtes qu'il sera facile de soigner... pour que tu puisses agrandir ta famille... mais à une condition."

"Laquelle, seigneur ?"

"Que tu n'attendes plus que ce soit moi qui me souvienne de toi, mais que tu viennes plus souvent me solliciter, que tu viennes chaque fois que tu auras besoin de mon aide. Et puis que, même si tu souhaites n'avoir qu'une seule tunique, tu en portes une meilleure pour ne pas faire pâle figure, si tu es vraiment ma main droite."


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