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histore originale par Andrej Koymasky


L'EXPLORATEUR ET LE GUIDE CHAPITRE 9
L'IMPRÉVU

Ivan était en train de lire un livre, comme il le faisait maintenant chaque soir en attendant qu'Attilio se fit vif comme il l'avait promis. Cela faisait quatre jours depuis qu'il l'avait vu et déjà il lui manquait... et pas seulement pour pouvoir avoir du sexe avec lui. Il sentait en soi un désir auquel il ne savait pas encore donner un nom, mais qu'il comprenait clairement ne pas être seulement physique.

"Il est gentil et mignon et bon..." se dit-il, et pourtant ce n'était pas juste cela. "Il était agréable de parler avec lui, puis il avait souvent des petites attentions pour moi..." se dit-il, tenant le livre ouvert devant lui, bien qu'il ait cessé de lire.

"Eh bien, peut-être il me plairait si entre nous pût naître un sentiment d'amitié..." pensait-il, en croyant avoir trouvé la réponse à ce qu'il ressentait.

Il se remit à lire, mais bientôt ses pensées revinrent à Attilio et aux dernières fois qu'ils avaient fait du sexe... et combien il lui avait plu soit le prendre qu'être pris. Il sentit qu'il était en train de s'exciter et passa une main inconsciemment sur sa braguette.

"Il est vraiment fort de faire l'amour..." dit-il dans un souffle.

Il retourna à la lecture. Il avait tout juste tourné la page lorsque de son portable vint le signal qu'il y avait un message. Il le prit et sentit son cœur battre : il était d'Attilio.

Il le lut immédiatement : «J'arrive. Peu de minutes et je suis chez toi. D'accord ? Confirme. Salut. Attilio.»

Il se sentit euphorique. Il répondit au message : «Je t'attends !!!» Il tapa rapide et l'envoya. Il mit le livre de côté, se leva, empocha le téléphone et pensa descendre l'attendre pour le voir arriver. Il vérifia avoir les clés dans sa poche et se dirigea vers la porte d'entrée.

Le téléphone sonna à nouveau. «Tu m'ouvres ?» c'était écrit dans le nouveau message. Ivan appuya sur le bouton pour ouvrir la porte sur la rue, ouvrit la porte de son quartier et attendit. Il le vit arriver en faisant deux marches à la fois.

Ils se saluèrent avec un large sourire. "Viens..." murmura Ivan, ému et excité.

Ils allèrent dans la chambre et, sans même fermer la porte tellement ils étaient tous les deux excités, Attilio le prit entre ses bras, en le poussant contre le chambranle de la porte et l'embrassa avec passion, tandis que d'une main il le caressait entre ses jambes pour tester son érection.

"Je suis content que tu sois là..." murmura Ivan, se sentant ému.

"Moi aussi." lui dit Attilio avec son beau sourire orné des délicieuses fossettes.

Ils s'embrassèrent à nouveau, en se poussant avec énergie l'un contre l'autre, pour sentir mieux l'érection du compagnon, en se caressant le dos et le derrière avec un plaisir croissant.

Ils étaient tellement absorbés à jouir de la proximité réciproque, en anticipant avec tout le corps combien les deux désiraient le faire, qu'ils n'entendirent pas la porte d'entrée s'ouvrir.

C'était le docteur Anselmo Grandi, le père adoptif d'Ivan, appelé d'urgence par la Banque San Paolo pour un problème, qui était rentré à Turin de la Suisse. Il avait l'intention de passer la nuit à la maison, pour aller au bureau, reposé. Il pensait aller avertir d'abord Ivan puis aussi Carla qu'il était revenu, donc il ouvrit la porte du couloir des chambres des fils et, ayant à peine dépassé le seuil, il s'arrêta pantois.

Les deux garçons ne l'avaient pas entendu arriver, soit parce que la porte ne faisait aucun bruit, soit parce qu'ils étaient trop excités et absorbés à s'embrasser et se caresser d'une manière intime.

L'homme les regarda un instant l'incrédule... Puis d'une voix basse mais claire, il dit : "Arrêtez !"

Les deux garçons sursautèrent et se détachèrent comme frappés par un choc électrique à haute tension, en se tournant vers la porte.

"Papa..." murmura Ivan en pâlissant.

"Vous, jeune homme, sortez immédiatement de cette maison." dit d'une voix neutre l'homme, et il se mit de côté pour laisser passer Attilio.

Ivan entendit la porte d'entrée se refermer.

"Cela signifie que tu es homosexuel, je suppose." dit l'homme sur un ton étonnamment calme.

"Oui, papa..."

"Que tu aies une tendance vers un mal moral intrinsèque, peut ne pas être de ta faute, mais ce que vous faisiez... c'est quelque chose qui... c'est un désordre objectif. Si tu veux rester dans cette maison, tu dois me jurer qu'à partir de maintenant tu vivras dans la chasteté."

"Je ne peux pas, papa... Je ne peux pas jurer quelque chose que je sais déjà que je ne peux pas maintenir. Que je n'ai pas maintenu... Tout le monde a le droit de vivre sa sexualité comme il est, comme il n'a pas choisi de l'avoir..."

"Le droit ? Le droit de pécher gravement ? Ne dis pas de sottises, Ivan."

"Je ne dis pas de sottises, papa. La chasteté est une vocation... que je sais ne pas avoir."

"Oui tu dis des sottises, pour ne pas les appeler bestialité. Même si tu avais été attiré par les filles, tu ne devais pas avoir du sexe avant le mariage, tu le sais bien. Un homme est tel parce qu'il sait comment contrôler ses instincts."

"Mais je ne pourrai jamais me marier, et..."

"Et donc tu dois rester chaste."

"Mais c'est absurde. Je... non, je ne peux pas, ce n'est pas possible." dit Ivan en tremblant. "Je pourrais te le jurer et puis le faire en secret, mais ce serait malhonnête..."

"Ce que tu fais, que tu es en train de faire, est malhonnête. Dans cette maison il n'y a pas de place pour un dégénéré immoral. Maintenant tu fais tes valises, prends tes affaires et laisses cette maison. Maintenant. Tu peux prendre aussi ta voiture."

"Mais papa... et où vais-je ?"

"Demande à l'Arsenal de la Paix un lit, ou dors dans ta voiture, comme tu préfères."

Ivan était plus choqué par le ton calme, tranquille et impitoyable du père que par le fait d'être chassé de la maison sur le champ. Il pensait tristement : "On m'a abandonné deux fois, par mes deux familles..." Mais il ne dit rien.

Le père, voyant qu'il ne bougeait pas, lui dit : "Eh bien, alors prépare tes valises, rapidement, je ne veux pas rester debout toute la nuit, j'ai besoin de repos."

Ivan se retourna et prit des valises, les ouvrit sur le lit et commença à y mettre dedans ses choses, en choisissant ce qui lui semblait le plus utile et important, se sentant comme un condamné qui va à l'échafaud.

Il vit que son père s'asseyait à son bureau et écrivait quelque chose. D'où il était il ne pouvait pas voir ce qu'il écrivait. Puis le père se leva, se tourna vers lui et lui remit un chèque : "Ceci est pour t'installer en quelque sorte. Demain matin, tu peux aller à la banque pour te le faire changer. Tu es un adulte, si tu ne veux plus ma guidance, tu es libre de faire ce que tu veux, même si je regrette que tu aies choisi la voie du péché le plus abominable pour un être humain."

"Je, papa..."

"Et tu peux arrêter de m'appeler papa." dit l'homme du le même ton tranquille.

Justement ce ton tranquille bouleversait Ivan plus que toute autre chose, ces mots prononcés sur le même ton avec lequel il lui aurait pu lui souhaiter la bonne nuit, en effet, même avec moins de chaleur. Il empocha le chèque sans même le regarder.

"Et laisse les clés de la maison sur le bureau." dit l'homme.

Ivan les y plaça immédiatement. Il termina en hâte de remplir les valises, les ferma et se dirigea vers la sortie. Puis il se tourna vers l'homme.

"Merci, docteur Grandi pour la... la charité chrétienne que vous avez montré à mon égard." dit-il amèrement et il sortit.

Il se sentait la tête tourner. Il descendit le grand escalier de marbre, sortit dans la rue, et alla jusqu'à l'endroit où il avait garé la voiture. Il y chargea ses bagages et s'assit dans le siège du conducteur. Pendant quelques minutes, il resta immobile, presque en peinant à respirer.

Il pensa qu'il ne se sentait pas d'aller demander un lit à l'Arsenal de la Paix. Il aurait dû expliquer pourquoi il avait été chassé de la maison. Il n'avait même pas assez d'argent en poche pour payer une chambre dans un hôtel...

Il pensa dormir là, dans la voiture... Puis il pensa à Attilio. Alors il prit son portable et lui envoya un message : «Tu dors ?»

Peu après, le téléphone sonna. Il répondit.

"Ivan ? Où es-tu, à la maison ?"

"Salut, Attilio. Non... il m'a chassé... Je suis dans ma voiture... Il me l'a laissée..."

"Merde, je suis désolé ! Putain... Que fais-tu maintenant ?"

"Je ne sais pas."

"Viens ici chez moi. Je viens de rentrer... Te rappelle-tu l'adresse ?"

"Oui..."

"Il t'a tabassé ?"

"Non"

"Viens, tu dormiras avec moi. Je vais t'attendre dans la rue, il n'y a pas la sonnette, dehors..."

"Merci. Je suis désolé de te déranger."

"Mais allez ! Viens, ne t'inquiète pas, maintenant. Nous allons parler, nous allons trouver une solution. Tant que tu ne t'installes pas, tu restes ici avec moi."

"Merci. Tu es plus un ami toi que mon... que lui."

Il ne réussissait même plus à dire «mon père» ... Il démarra. En peu de minutes, il arriva à la maison d'Attilio, qui était déjà dans la rue à l'attendre. Il se gara et Attilio l'aida à décharger les bagages, puis lui ouvrit la voie. Ils descendirent les escaliers, et Ivan vit la vieille porte peinte avec la colombe de la paix de Picasso, comme l'autre lui avait décrit. Ils entrèrent et Attilio alluma la lampe. C'était une chambre simple, pauvre, avec une kitchenette, une table avec quatre chaises, un lit avec un rideau devant maintenant ouvert, une armoire et une étagère, et un lustre en papier, sphérique, de style japonais, tous dans le style essentiel des meubles Ikea.

Ayant posé les bagages au sol, Attilio le serra fort, en lui donnant des tapes légères sur le dos : "Ne t'inquiète pas, Ivan. Tant que tu ne t'installes pas, tu restes ici avec moi. Demain, nous allons à une quincaillerie et je te fais faire les copies des clés. Assieds-toi maintenant, on boit une bière, j'en ai seulement deux dans le réfrigérateur. Et tu me racontes tout..."

"Il y a peu à raconter..." dit Ivan avec une expression désolée, et il lui dit comment s'était passé la brève conversation avec l'homme qui l'avait adopté.

"Merde, alors... mais il n'a pas une âme, un cœur, des sentiments cet homme ? S'il avait crié, s'il t'avait insulté... je l'aurais respecté plus !"

"Et ainsi... deux fois abandonné, la première fois quand j'avais trois ans, la seconde à dix-huit ans. Il semble que personne ne me veut..."

"Mais allez ! Tu es un gars bien, toi. Ce n'est pas ta faute... si tu as été malheureux."

"Je lui ai rendu les clés de la maison... Je ne peux pas lui rendre le nom de famille, malheureusement. J'espère me trouver en hâte un boulot, et puis une chambre, Attilio. Cependant, aussi longtemps que je ne peux pas, je te paie les frais, nous les divisons, si cela te va bien... "

"Ce n'est pas nécessaire. Et puis, tu es resté sans argent à cause de moi..."

"Non, regarde, il m'a donné le bon de sortie..." dit Ivan avec ironie et lui montre le chèque.

Attilio le regarda : "Eh bien... au moins il n'a pas été avare... Il l'a fait à coup sûr juste pour se sentir une conscience claire. Cependant... si tu fais attention, tu peux t'en tirer assez longtemps."

"Combien c'est ?" demanda Ivan qui ne l'avait même pas regardé.

"Cinq mille Euro."

"Ah. Bon, tu vois que je peux partager les dépenses avec toi."

"Ce n'est pas nécessaire..."

"C'est juste. De toute façon, je vais essayer de partir le plus tôt possible. Je te remercie de me permettre de venir ici chez toi."

"C'est le moins que je pouvais faire, non ?"

"Tu n'avais jamais voulu aucun client ici, tu m'avais dit..."

"Tu n'es plus un client, pour moi, tu l'as oublié ? Je suis venu chez toi par amitié, non ?"

"Merci. Tu es plus généreux que lui."

"Et merde, mais pas même un chien on ne le jette dans la rue ainsi !"

"Ben, toi aussi... Les tiens t'ont chassé... tu sais comment on se sent. Et ceux-là étaient tes vrais parents. Je me demande comment ils vont faire maintenant qu'ils n'ont plus les cinq continents dans la maison. Je parie que cela les embête plus que le fait que je sois pédé." dit Ivan avec une ironie amère.

"Et dire qu'habituellement on fermait immédiatement la porte..."

"Tu crois qu'il n'aurait pas compris tout de même à me trouver enfermé dans la nuit avec un mec ?"

"Eh bien... au moins on aurait pu lui dire que je suis juste un ami... Que sais-je..."

"Non, ça devait se passer ainsi. D'ailleurs, je le savais que pour nous gays la vie n'est pas facile. Surtout quand on a à faire avec des gens d'église comme eux, qui ont de l'eau bénite pour sang. Talibans catholiques !"

Attilio sourit à cette dernière définition. "Quelqu'un devrait avertir Bush qu'ils doivent venir les bombarder..." dit-il avec ironie.

Ivan fit un sourire fatigué.

Attilio lui caressa une joue : "Tu verras que tu t'en tireras bien... Tout de même, ainsi tu ne pourras pas aller au collège, à moins que tu trouves un travail de nuit..."

"Comme le tien ?"

"Non !" s'écria Attilio, puis doucement il ajouta : "Non, pas toi."

"Pourquoi pas ?"

"Tu es une personne propre, cette vie n'est pas pour toi, non."

"Et pour toi, alors ? Toi aussi t'es un garçon propre..."

"Moi... Au début, je... Je l'ai fait par colère, par rébellion, par dépit, par... Et puis, une fois commencé... Mais je veux que tu n'y penses même pas. Promets-le-moi."

"Oui, je te le promets. Ce n'est pas que l'idée m'attire, honnêtement." dit-il doucement, puis il ajouta : "Je ne dis pas cela pour te juger, Attilio."

"Je sais que tu ne me juges pas, ne t'inquiètes pas. Es-tu fatigué ? Veux-tu aller au lit ?"

"Oui, peut-être..."

"Je n'ai qu'un seul lit, mais il est à une place et demi..."

"Oui, ça va bien."

Ils se déshabillèrent et s'étendirent sur les draps, car il faisait chaud. Attilio tendit la main et éteignit la lumière.

"Je suis heureux de t'avoir ici..." dit-il, et il l'embrassa doucement.

Ivan sentit que ce n'était pas une étreinte avec une implication érotique, mais un geste de tendresse, d'amitié, de consolation et il posa sa tête sur son épaule.

"Merci. Mais... un des prochains soirs... si tu veux... tu m'avais promis que..."

"Oui, bien sûr. L'un des prochains soirs. Volontiers. Même plus d'un, si ça te va. Tu le sais que tu me plais, non ?"

"Toi aussi."

Ivan était surpris que, en dépit que leurs corps nus se touchaient, ils n'étaient pas excités. Agréablement surpris, parce qu'il comprit que, entre eux, il y avait non seulement l'attirance physique mais, malgré qu'ils s'étaient connus depuis peu, il y avait déjà de l'amitié.

"Je me suis senti le sang se glacer en moi quand je l'ai vu nous regarder..." murmura Attilio.

"Ben... moi aussi."

"J'ai eu peur qu'il te frappe... J'aurais voulu rester là avec toi, mais je ne pouvais pas."

"Non, bien sûr. C'est sa maison, donc... S'il avait crié, s'il m'avait tabassé... il aurait été plus humain. Celui-là a le portrait de Ratzinger à la place du cœur."

"Tant pis pour lui. Si Dieu existe, et quand il se présentera devant lui un jour... j'espère qu'il le lui fera payer."

"Non, Attilio... Si Dieu existe, il ne peut qu'être bon, et il lui pardonnera, parce que... parce que «ils ne savent pas ce qu'ils font»..."

"Tu es trop bon, toi. Je parie que tu lui as déjà pardonné."

"Après tout il m'a entretenu, élevé pendant douze ans, même si je ne suis pas son fils, n'est-ce pas ? Je pense que ce n'est pas sa faute si... s'il est ainsi. Tu ne leur as pas pardonné, aux tiens ?"

"Je ne sais pas. Je ne les hais plus, mais... Je ne me soucie pas plus d'eux, voilà. Ils sont devenus des étrangers pour moi, comme je le suis pour eux. Et moi, comme toi, je n'ai pas pu leur rendre leur nom de famille."

"Et tu avais seulement seize ans..."

"C'est le passé, je m'en suis tiré. Bien sûr... Je n'arrive pas à les aimer... Non, je ne peux pas."

"Peut-être que ce n'est même pas leur faute s'ils sont ainsi. Tout, de l'église à la société leur apprend à haïr, à mépriser, à.... tout. Essayons de dormir, maintenant, Attilio, je me sens fatigué."

"Oui, mon ami. Bonne nuit."

Ivan sentit dans ce simple salut, toute la chaleur que le docteur Anselmo Grandi n'avait pas su ni voulu lui donner.

Limerick final :
Même si Ivan ne vivait pas à Paris
Par son père il fut surpris avec l'ami
À s'étreindre, s'embrasser :
De maison il fut chassé.
Donc il alla chez Attilio pour dormir.


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© Matt & Andrej Koymasky, 2019