Un soir, Micheal avait dû aller chez ses parents parce que son père allait mal, Brian était au salon et parlait avec Aine.
"Aujourd'hui Stanley m'a remis sa démission..." dit Aine.
"Ah bon ? Je l'ignorais, il ne m'a rien dit... Et pourquoi donc ?"
"Je crois qu'il a eu une offre d'embauche à Londres. Il a dit qu'il s'y installerait avec sa famille."
"Il passe à la concurrence ?" demanda Brian.
"Sans doute. Alors j'ai décidé que tu prendrais sa place. Et on chargera l'agence de nous envoyer quelques CV de jeunes designers. Il faudra que tu choisisses qui embaucher. J'en voudrais deux."
"D'accord."
"Je me trompe ou... d'ici un mois Micheal et toi fêterez vos trois ans ensemble ?"
"Oui, le quatorze mai." répondit Brian en souriant.
Mais Aine perçut comme une ombre dans le sourire du jeune homme. "Quelque chose ne va pas ?" demanda-t-elle un peu inquiète.
"Non... Pas vraiment..."
"C'est donc oui. Quoi ?"
"J'ai l'impression... je ne sais pas mais... c'est comme si..." commença-t-il, hésitant, puis il dit, presque précipitamment : "J'ai peur qu'il se lasse de moi."
"Qui ? Micheal ? Mais allons ! Il est resté vingt ans avec mon mari... S'il y a quelqu'un qui n'est pas du genre à se lasser, c'est lui."
"Mais je ne suis pas Tomas... Lui... c'était quelqu'un d'exceptionnel."
"Bien sûr que tu n'es pas Tomas, tu es Brian ! Et maintenant Micheal est amoureux de Brian, pas d'un autre Tomas. Ne crois-tu pas que c'est ses soucis sur la santé de son père qui te l'ont fait voir un peu... différent de d'habitude ?"
"Ça date d'avant qu'on sache pour les ennuis de son père..."
"Il... enfin... au lit, ce n'est plus..." demanda-t-elle, un peu gênée.
"Non, non; de ce côté là, aucun problème. Non... mais j'ai l'impression que... de ne pas lui donner tout ce qu'il mérite, tout ce qu'il désire."
"Tout amoureux a toujours ces craintes. Moi je crois que tu te crées des problèmes idiots et inexistants. Tu ne lui en as pas parlé ?"
"Non... tu sais... je ne veux pas qu'il se sente... oppressé par mes craintes. Je ne veux pas lui faire des jérémiades."
"Quel idiot ! Je n'ai en rien eu cette impression. Je n'ai rien remarqué de différent dans son comportement. Qu'est-ce qui te fait penser qu'il se lasse de toi ?"
"Et bien... rien de concret. C'est pour ça aussi que je ne lui en ai pas parlé, je n'aurais pas su quoi lui dire..."
"Mais ce que tu m'as dit à moi, ni plus ni moins. Moi, à ta place, je lui en parlerais. Si ça a bien marché avec Tomas c'est aussi parce qu'on se parlait toujours de tout... Bon, de 'presque' tout." conclut-elle avec un petit sourire.
Brian comprit qu'elle parlait de la relation entre Tomas et Micheal.
Aine continua : "Ne serait-ce pas plutôt toi qui te lasses de lui et qui projettes tes sentiments sur lui ?"
Brian la regarda, stupéfait : "Non ! Oh non, Aine, je suis plus amoureux de lui que jamais. C'est vrai. Mon dieu, mieux je le connais mieux je suis avec lui, plus il me plait, plus je pense avoir de la chance d'être avec lui."
"Mais alors, bon dieu, d'où viennent tes craintes ?"
"Je ne sais pas... je ne sais pas, mais elles sont là." gémit presque Brian, l'air désolé.
Aine posa une main sur la sienne, dans une caresse légère. Puis elle eut un bref soupir : "Tu sais, Brian... je peux me tromper mais... à ce que je sais de la vie, d'après mon expérience, un couple en arrive à une crise quand l'un des deux commence à se demander ce que l'autre ne lui donne pas, ne fait pas pour lui, et pas le contraire.
"Si la relation entre Tomas et moi, ou entre Tomas et Micheal, a duré aussi longtemps, ce n'est pas par routine, mais par amour, c'est parce que chacun de nous trois s'est toujours occupé et préoccupé de donner à l'autre tout ce dont il pouvait avoir besoin. Donner, pas recevoir.
"Un jour, juste après que j'ai rencontré Micheal, il a comparé notre relation... inhabituelle avec Tomas qui nous aimait tous les deux, avec les trois flèches de la cathédrale Saint Finbarre... leur harmonie, leur beauté étaient l'essence et l'âme de la cathédrale, ce que Micheal appelait notre cathédrale d'amour.
"Combien plus facile ce doit être quand... quand les flèches ne sont que deux, comme dans votre cas. Tu viens de me dire que tu avais l'impression de ne pas lui donner tout ce dont il a besoin, ce qu'il mérite. C'est la bonne attitude. Tant qu'elle est vécue... avec légèreté. Je suis certaine que si tu continues à essayer de lui donner tout ce que tu peux, sans te demander ce qu'il peut te donner, il n'y aura aucun problème.
"Je te dis qu'il n'y aura aucun problème parce que je sais que Micheal est gentil et généreux et qu'il ne s'inquiète que de donner à qui il aime autant qu'il peut. Et je crois que Micheal t'aime. Il ne se lasse en rien de toi. N'as-tu pas remarqué le long regard par lequel il t'a dit au revoir quand il a dû partir ? Ce regard était plus qu'une caresse... pour moi c'était le regard d'un amoureux qui se doit se séparer de la personne qu'il aime."
"Alors... tu crois que je me pose de faux problèmes ?" demanda Brian avec une pointe d'espoir dans la voix.
"Exactement. Et puis, il y a désormais entre Micheal et moi plus qu'amitié et confiance, s'il avait eu le moindre problème avec toi, je suis certaine qu'il m'en aurait parlé, ou au moins qu'il y aurait fait allusion. Et je crois que même sans cela je m'en serais aperçue. Vraiment, Brian, je crois..."
Ils furent interrompus par la sonnerie du portable de Brian, lequel s'excusa du regard et répondit.
"Oui." dit Brian.
"Mon amour ! C'est Micheal."
"Oh, salut. Comment vas-tu ? Comment va ton père ?"
"On vient de l'emmener à l'hôpital, ils l'examinent. Tu sais que... tu me manques déjà, mon amour ?"
"Je te manque ?" demanda Brian à voix basse, ému.
"Oui, surtout à un tel moment. Et parce que j'ignore si je pourrai rentrer vite. En tout cas pas tout de suite. C'est la première fois que nous sommes séparés."
"Oui. À moi aussi tu me manques."
"Samedi... s'il fallait que je reste encore ici... tu viendrais passer le week-end avec moi ?"
"Oui, bien sûr. Tu me réserves une chambre d'hôtel ?"
"Non, viens chez mes parents. Ils savent qu'on est ensemble et maman aurait plaisir à enfin te rencontrer."
"Je te manque vraiment ?" redemanda Brian.
"Quelle question ! Qu'ai-je fait qui puisse t'en faire douter ?" demanda sa voix, douce, dans le téléphone.
"Non... rien... c'est que... ça fait plaisir à entendre..."
"Je me sens... diminué de ne pas t'avoir avec moi. Mon dieu, c'est bien vrai qu'on ne comprend l'importance des choses que lorsqu'on vient à en manquer, ne serait-ce qu'un moment. Maman est avec moi et elle me dit de te saluer."
"Salue-la aussi. Je t'aime tant, Micheal..."
"Je sais. Grâce au ciel. Moi aussi. Je te rappelle dès que les médecins nous disent quelque chose. De toutes façons, on se voit samedi, d'accord ?"
"Oui, bien sûr. Tous mes vœux pour ton père."
"Merci. Salut."
"Salut."
Il coupa la ligne puis regarda Aine qui lui sourit.
"Je parie que cet appel t'a fait plus de bien que tous mes bavardages..." lui dit-elle.
"Disons plutôt... qu'il a été la cerise sur le gâteau."
"Il veut que tu ailles le voir, c'est ça ?"
"Oui, ce week-end, s'il ne peut pas rentrer. Il a dit que sa mère serait contente de me connaître."
"Tu vois ? Crois-tu qu'il voudrait te présenter à ses parents s'il se lassait de toi ?" lui demanda Aine avec un sourire.
"Peut-être... mes peurs viennent peut-être de ce que mes relations précédentes n'ont jamais dépassé les deux ans, et..."
"... et tu te demandais si ça n'avait pas été par ta faute et s'il n'en serait pas de même cette fois encore." compléta Aine.
"Oui. Mon dieu, je me sens tellement idiot, maintenant..."
Aine le serra brièvement dans ses bras et lui dit : "Un délicieux idiot, quoi qu'il en soit. Ne te plâtre pas le bras avant qu'il soit cassé, d'accord ? Et quand tu le verras, raconte-lui tout, parles-en-lui, même si le problème te semble maintenant résolu."
"Je le ferai. Oui, je le ferai."
Ainsi, le vendredi dès la sortie du travail, Brian alla rejoindre Micheal.
Sa mère l'accueillit avec simplicité : "Alors je te rencontre enfin, Brian. Je peux te dire tu, hein ? Micheal nous a tant parlé de toi. Viens, viens, on passe bientôt à table. Je vous laisse un moment, je dois finir le repas...." dit-elle avec un large sourire avant d'aller à la cuisine.
Michael le prit par les épaules et l'embrassa : "Merci d'être venu. Tu m'as tellement manqué..."
"Toi aussi, mon amour..." dit Brian et, comme promis à Aine, il lui parla de ses doutes, bien qu'à présent dissipés.
Micheal l'écouta puis dit : "Je suis désolé si tu as eu ce problème par ma faute. Tu as bien fait de m'en parler. Je ne veux que ton bonheur..."
"Et moi le tien, mon amour... Et ce n'a pas été de ta faute si..."
Ils s'embrassèrent encore.
"Mais dis-moi, il a quoi exactement, ton père ?"
"Une ischémie myocardique."
"Une quoi ? Qu'est-ce que c'est ?" demanda Brian.
"Cela veut dire qu'un apport insuffisant d'oxygène au myocarde, le muscle du coeur, a provoqué un infarctus. Tomas, malheureusement, en est mort. Papa, lui, a été pris en charge à temps."
"Il doit rester longtemps à l'hôpital ?"
"Non. Ils lui ont fait un pontage coronarien et il pourra sortir d'ici quatre à cinq jours, puis après il aura une convalescence d'environ deux semaines."
"Et il n'aura plus de problèmes ?"
"Après l'intervention il pourrait falloir jusqu'à deux mois pour une récupération complète, ils disent qu'au début le corps utilise la majeure partie des ressources à sa disposition pour récupérer du choc opératoire. Néanmoins, dès qu'il pourra rentrer à la maison je pourrai rentrer à Cork. Il faudra que tu aies encore quelques jours de patience..."
"Ne t'en fais pas pour moi..."
"Comment pourrais-je ne pas m'en faire pour toi ?"
Sa mère revint de la cuisine et annonça : "À table, les garçons !"
Ils passèrent à table et, pendant le repas, la mère de Micheal dit : "Merci d'être venu, Brian : tu as rendu le sourire à mon Micheal. Je suis très contente de faire enfin la connaissance de l'ami de mon fils."
Brian sourit : "Moi aussi je suis très content de vous rencontrer, Mrs O'Brien..."
"Ah non, si je t'appelle par ton prénom, tu dois toi aussi m'appeler par le mien. Hein ? Tu fais bien partie de la famille, non ?"
"D'accord, Marion."
"Demain, quand nous irons voir papa à l'hôpital, tu viendras avec nous. Ryan aussi aimerait te connaître, enfin. Micheal nous avait envoyé ta photo quand on le lui a demandé, une belle photo, mais je dois dire que tu es encore mieux en personne."
"Merci... c'est agréable de se sentir si... bien accueilli."
"Bah, on dit que les gens de la campagne sont accueillants, non ?" répondit-elle avec simplicité.
Plus tard, quand ils se retirèrent après avoir souhaité bonne nuit à la mère de Micheal, ce denier demanda à Brian : "Alors, que penses-tu de ma mère ?"
"Elle me plait beaucoup. Surtout la simplicité et le naturel avec lesquels elle m'a accueilli... bien que je sois un garçon."
"Quand, ado, je leur ai dit que j'étais gay, ils en ont tranquillement parlé avec moi et ils m'ont aussitôt accepté comme j'étais. Alors, bien sûr, ils ont d'abord accepté Tomas, mon ami, et maintenant toi... Mes parents savent que je t'aime et que tu m'aimes, alors ils t'aiment aussi."
"Oui, je m'en suis rendu compte, et c'est une belle sensation. Aine aussi nous aime bien. Tu sais... dans un certain sens... je n'en avais pas l'habitude. Je veux dire... tu sais, mes oncle et tante qui m'ont élevé n'ont jamais accepté ni ma sexualité ni par la suite mes amis. On... s'habitue à cette situation, mais ce n'est assurément pas agréable. Ou plus que s'y habituer, on la subit."
Pendant qu'ils parlaient ils s'étaient déshabillés et mis au lit. Ils s'enlacèrent et commencèrent à faire l'amour. Plus tard, finalement apaisés, ils s'étendirent enlacés et Micheal demanda : "Je suis arrivé à dissiper tous tes doutes ?"
"Oui..." répondit Brian avec un sourire tendre. "Complètement."
"Bon. Tu sais, quand j'étais gamin et que j'habitais encore ici chez mes parents, un jour j'ai volé quelques pièces dans le sac de maman pour m'acheter une babiole dont j'avais envie. Puis, repentant, je suis allé me confesser. Le curé m'a dit : tu dois jurer de ne plus jamais faire ça. J'y ai réfléchi un peu et j'ai dit : je ne peux pas. Oui, je voudrais ne plus jamais le faire, mais comment puis-je le jurer ? Alors il m'a dit : Si tu ne te repens pas, je ne peux pas te donner l'absolution. Et moi : si je ne me repentais pas, je ne serais pas venu me confesser. Mais je ne peux pas jurer."
"C'était vrai. Et alors ?"
"Alors il ne m'a pas donné l'absolution. Et pourtant, après cette fois là, je n'ai jamais plus volé, pas même une épingle. Mais je ne pouvais pas le jurer. Non, vraiment pas, ce n'aurait pas été honnête. Je ne pouvais que promettre que je ferais de mon mieux pour ne pas mal faire de nouveau, tu comprends ?"
"Oui, bien sûr."
"Et voilà. De même, Brian, je ne peux pas te jurer que je t'aimerai toujours. Mais je peux te promettre que je ferai de mon mieux pour te donner tout mon amour, jours après jours. Je peux te promettre que je m'y appliquerai de tout mon être. Et aussi qu'à toi, je ne demande rien d'autre."
Brian sourit : "J'ai compris. Oui, c'est tout à fait ça. Et moi aussi je te fais la même promesse. Oui, je ferai de mon mieux. Et nous nous aiderons l'un l'autre et peut-être y arriverons-nous, non ?"
"Exactement. Et pour cela, pour pouvoir s'aider l'un l'autre, nous devons toujours tout nous dire."
"C'est exactement ce que m'a dit Aine. Et pourtant... Tomas ne lui avait pas tout dit... il ne lui avait pas parlé de toi."
"Il aurait dû le faire avant de demander Aine en mariage. Il n'était pas encore amoureux d'elle, aussi a-t-il pensé que ce n'était pas nécessaire. Que s'ait été bien ou mal, quand il s'est aperçu qu'il tombait amoureux d'elle, il m'en a parlé à moi, mais il n'a pas eu le courage de lui parler de moi."
"Peut-être craignait-il de la mettre devant le fait accompli, puisqu'ils étaient mariés. Au fond, il était plus... libre avec toi."
"Si exceptionnel qu'ait été Tomas, il n'était certainement pas un homme parfait. Personne ne l'est. Et même si je n'étais pas entièrement d'accord avec lui, après en avoir discuté, j'ai accepté son choix."
"Mais ensuite... après tout ça a marché, non ? À ce qu'Aine comme toi me dites, il vous a aimés tous les deux, il vous a vraiment aimés."
"Oui, Tomas était un homme qui savait vraiment aimer. Malgré ses limites. Ou grâce à ses limites, va savoir..."
"Comment fait-on pour apprendre à aimer vraiment ?"
Micheal sourit : "Et qui sait ? Je ne crois pas qu'il y ait de méthode pour apprendre à aimer. Et, je crois, l'amour est quelque chose qui se crée à tout instant, il ne nous tombe pas dessus comme ça, à l'improviste. Il s'apprend, il se cultive. Je crois que le premier pas, essentiel, est de s'accepter comme on est, de se respecter et de s'aimer. Pas être narcissique, mais ce n'est qu'en s'acceptant qu'on peut, éventuellement, changer en mieux.
"Alors on est prêt à faire le second pas. Aimer signifie accepter l'autre comme il est, apprendre à ne plus voir en lui que ce qu'il a de plus beau, apprendre à admirer son sourire, apprendre à écouter et entendre les mots délicieux qu'il dit pour toi ou pour les autres, apprendre à le respecter dans sa différence, à le rassurer, le consoler et à veiller sur lui.
"Prends quelqu'un qui te plait, un collègue, un ami, n'importe qui... et essaie de voir toutes les qualités qu'il a en lui. Essaie de percevoir ce qu'il y a de plus beau en lui et remercie-le, au moins dans ton cœur, pour les cadeaux qu'il te fait. Apprends à l'aimer au-delà de son aspect physique, apprends à l'aimer en lui pardonnant ses faiblesses et ses incompréhensions. Apprends à l'aimer en acceptant qu'il est différent de ce que tu voudrais."
"Encore heureux que tu aies dit que tu ne sais pas comment on apprend à aimer. Tu as tracé un programme pour la vie..." lui dit Brian en le caressant.
"Plus tu aimes plus tu es capable d'amour. Et plus tu aimes de gens, mieux tu sais les aimer chacun."
"Mais l'amour avec un grand A, l'amour à deux... comme celui qu'il y a entre toi et moi ?"
"Il n'est pas différent des autres, sauf par son intensité, le partage complet de tout et par sa manifestation physique, le sexe. L'aspiration à devenir 'un'. Tu vois, la complète sincérité avec l'autre est la conséquence naturelle de cette aspiration à ne former 'qu'un', pas vrai ? Si tu as un doute, une incertitude, un problème, tu ne peux pas te le cacher à toi-même. Alors le cacher à la personne avec qui tu aspires à n'être qu'un, c'est comme si tu te mentais à toi-même."
"Mais dis-moi, Micheal..."
"Quoi ?"
"Pourquoi entre parents et enfants, enseignants et élèves, entre amis, on ne parle jamais d'amour ? Ni même entre amants ?"
"Je me le suis souvent demandé moi aussi... Avec Tomas nous en parlions. Oh, pas en permanence, mais ça arrivait assez souvent. D'ailleurs, surtout quand on entendait dire ou qu'on lisait des phrases comme : En amour vainc qui fuit... Celui qui n'est pas jaloux n'aime pas vraiment... et autres bêtises de ce genre. Moi, au début j'avais comme de la pudeur à parler d'amour... une pudeur mal placée."
"Moi aussi... mais... je suis content qu'on en parle maintenant. Même si je comprends qu'il ne suffit pas d'en parler, que les faits doivent suivre les mots. Tu as dit tout à l'heure que l'amour entre amants est si grand qu'il 'doit' s'exprimer aussi par le sexe, par le corps..."
"Oui, c'est vrai, il ne peut pas en aller autrement."
"Je veux apprendre à aimer vraiment..."
"Nous apprenons, ensemble."
"Et j'aimerais que quelqu'un puisse dire de moi, un jour, que j'étais un homme qui savait vraiment aimer. Comme tu le dis souvent de Tomas... il savait vraiment aimer malgré ses limites."
"Peut-être qu'un jour quelqu'un le dira de nous... ou peut-être pas. Ce n'est pas très important. Du moins pour nous."
"Mais ne serait-ce pas important pour la personne qui le dirait ? Porter cette appréciation sur quelqu'un serait pour lui réaliser qu'il apprend à 'reconnaître' l'amour."
Micheal sourit : "Je crois que tu as raison. Dire cela de quelqu'un c'est comme en faire un monuments. Et les monuments ne servent jamais à ceux au nom de qui on les érige, mais aux autres."
Brian se lova contre le corps de son amant, il se sentait au ciel. Oui, il en était sûr, cette fois ils avaient franchi ensemble un pas important, alors peut-être qu'un jour quelqu'un pourrait dire d'eux, d'eux deux : "Micheal et Brian ? C'étaient deux hommes qui savaient vraiment aimer !"