Le télégramme chiffré qui arriva à l'ambassade de Morgovie à Londres pour les agents des services secrets parlait clair : "Convaincre sujet accepter absolument. Ses habitudes non problème, mais garder secret, même avec ambassadeur. Roi mourant. Faire vite !"
Dans le même temps, par l'intermédiaire d'un courrier express spécial, furent envoyées à l'ambassadeur les copies des documents de changement de nom de Stephen Walker, de nomination de prince héritier et des instructions sur la façon d'organiser son voyage jusqu'à Morgovie : avec luxe et respect, mais de manière privée.
Le chef des agents morgoviens à Londres organisa les plans d'action. Et enfin, le mécanisme complexe fut mis en mouvement.
Stephen, ignorant combien on était en train de parler de lui à Londres et à deux mille kilomètres de là, était dans l'entrepôt du magasin et finissait de faire avec sa mère un inventaire sommaire, pour voir quelles priorités donner à la fois à des artisans locaux et à l'importateur de vanneries orientales, la Soane & Soane & Sons Ltd.
Deux agents secrets morgoviens entrèrent dans le magasin. La sœur de Stephen arrêta de feuilleter une vieille copie de la revue «Journal des Dames» et sourit aux deux nouveaux venus, mais son sourire disparut quand elle vit les expressions austères.
"Je peux vous servir, messieurs ?" Demanda-t-elle avec hésitation, en se demandant s'ils n'étaient pas des agents de Scotland Yard en civil.
"Bonjour, Mademoiselle. Monsieur Stephen Walker est-il présent ?"
"Pour... quoi ?" demanda la jeune fille de plus en plus convaincue d'avoir raison, et un peu tendue.
"Nous aurions plaisir à nous entretenir avec lui personnellement !" dit le second des deux hommes.
Bizarre, pensa la fille, celui-ci semble étranger... "Eh bien... Je vais voir s'il n'est pas déjà sorti..." dit-elle. "Ayez la bonté d'attendre un instant."
Elle alla dans l'arrière boutique et de là au dépôt. "Stephen... dans le magasin il y a deux officiers de Scotland Yard étrangers qui te cherchent !" Dit elle agitée.
"Agents étrangers de Scotland Yard ?" Demanda Stephen, étonné. "Comment est-ce possible ? Ne dis pas de bêtises. Qu'est-ce qu'ils veulent ?"
"Non je ne dis pas de bêtises ! Ce n'est pas ma faute si ce sont des étrangers, non ? Et ils sont là en personne, et comment c'est possible ! Ils disent qu'ils veulent te parler en personne, mais je leur ai dit que je ne sais pas si tu es là..."
"Tu as fait quelque chose, Stephen ? As tu violé la loi, par hasard ?" demanda la mère, inquiète.
"Mais non... je ne me suis même pas enivré ! Eh bien, je vais voir..."
"Sois gentil avec eux : tu sais qu'ils deviennent méchants si on ne leur montre pas du respect..." dit sa mère, agitée.
"Mais oui, mais oui. Ils voudront seulement quelque renseignement..." dit Stephen calme et entra dans la boutique, suivi par les deux femmes, mais elles s'arrêtèrent dans l'arrière salle pour écouter.
"Messieurs... vous me cherchez ?"
"Oui, monsieur Stephen Walker. Vous acceptez de nous suivre pour que nous puissions parler en toute confidentialité ?" dit le premier.
"Sans être interrompus." ajouta le second.
"Vous suivre ? Où ?" Demanda Stephen un peu incertain. "On ne peut pas parler ici ?"
"Cette conversation ne peut pas être écoutée par les deux femmes là derrière. C'est une affaire d'hommes! Vous choisir où parler, mais pas ici." dit le second, qui parlait vraiment comme un étranger, mais qui semblait le chef des deux.
Une affaire d'hommes! Se dit Stephen, légèrement tendu ; ceux-ci ont découvert mes habitudes sexuelles... Bien sûr que je préfère en parler ailleurs !
"Eh bien, sortons, alors." Dit-il et il les suivit sans hésitation. "Où allons-nous ?"
"Où vous voulez, du moment qu'on est seuls." dit celui qui parlait bien l'anglais.
"Chez moi... maintenant il n'y a personne... Mais qu'est-ce ? Y a-t-il quelque problème ?"
"Oui, c'est très bien. Nous allons parler à la maison. Pas de problème si vous monsieur Stephen comprenez notre problème et nous aidez..."
Le garçon percevait une attitude de respect dans les deux hommes austères. Ils avaient accepté de lui parler chez lui... Alors, il ne devrait pas y avoir de problèmes. Ils avaient besoin de son aide ? Dans une affaire d'hommes ? Eh bien... aucun d'eux n'était vraiment son genre... pensait-il avec amusement.
Ils entrèrent dans l'appartement, et il les fit asseoir dans le salon. Puis, essayant d'être un bon hôte, il leur offrit une boisson.
"Nous ne buvons jamais en service..." dit celui qui parlait bien l'anglais.
"Mais... de l'eau ? Un thé ?" Demanda quand même Stephen.
"Peut-être plus tard, je vous remercie. Maintenant nous nous présentons : Lui c'est mon chef, le capitaine Tripovic' et je suis l'agent désigné Vaselin. Vous connaissez la Morgovie ?"
"Morgovie ? Non, qu'est-ce ? Ça se mange ?"
"Non, monsieur Walker, la Morgovie est notre patrie. Notre roi, sa majesté Jedrek Markovic', est gravement malade et n'a malheureusement pas de fils..."
"Oh, je suis désolé..." dit Stephen se demandant ce qu'ils voulaient de lui : il n'était pas médecin !
"Et s'il n'y a pas d'héritiers, le roi de Pannirie nous annexe... et nous ne voulons pas devenir des sujets pannires !"
"Hé bien, bien sûr... si l'Allemagne voulait annexer l'Angleterre, même moi je n'aimerais pas... Mais je ne comprends pas comment je..."
"Votre défunt père, monsieur Stephen Walker, s'appelait Valentin Walker..."
"Oui..." et qu'est-ce que cela a à faire ? Se demanda le jeune homme.
"Et le nom de votre grand-père était Tomasz Walker."
"C'est vrai..."
"Tomasz est un nom morgovien, pas l'anglais..."
"Eh bien, pas anglais... mais mon grand-père est né en Angleterre..."
"Oui, par Eleanor Walker... et vous savez qui est le père de Tomasz Walker ?"
"Non... quelqu'un qui... a profité de grand-mère, mais ne l'a pas épousée, je suppose."
"Oui, il en est à peu près ainsi. Le père de Tomasz Walker s'appelait Konrad Markovic', et était le fils du roi Jakub Markovic' et le frère du roi Filip Markovic', le grand-père du roi Jedrek Markovic'."
"Vous voulez dire que mon grand-père... que je... que votre roi est..." Stephen demanda, en écarquillant les yeux.
"Que vous, Altesse Royale, vous êtes l'héritier du trône de Morgovie !" s'exclama Vaselin et les deux se levèrent debout et se prosternèrent.
Stephen fit presque un bond en arrière, puis il se leva et les regarda avec incrédulité : "C'est quoi cette plaisanterie?"
"Pas une plaisanterie, Altesse. Si le prince avait pu épouser votre grand-mère, la conduire à l'autel, vous maintenant vous appelleriez Markovic' et non Walker."
"Mais mon nom est Walker, pas Markovic'. Je suis un anglais... pas un morgooo vièse... morgovien, comme vous avez dit... Et je suis un vannier pas une Altesse."
"Vous devez venir à l'ambassade avec nous et le nom et le rang qui vous conviennent vous seront donnés, puis nous vous accompagnerons en Morgovie où vous serez investi comme prince héréditaire et..."
"Hé, hé, hé ... doucement ! Le nom je l'ai déjà et je l'aime, et... moi prince héréditaire ? Mais ne plaisantons pas ! Je suis juste un vannier, vendeur de paniers et de..."
"Votre Altesse..."
"Et cessez de m'appeler Altesse ! Je suis un Walker, pas un Markovic' ! Prince... moi ?"
"Tout est prêt et..."
"Mais je ne sais pas faire le prince. Ne plaisantons pas !"
"Non, Altes... monsieur Walker, on ne plaisante pas du tout. Si vous n'êtes pas d'accord, pour nous c'est comme si l'Allemagne annexait l'Angleterre, comme vous le dites. Donc, vous ne pouvez pas trahir votre peuple, monsieur Walker."
"Mon peuple ? Mais je... Quoi qu'il en soit... même si j'étais d'accord... vous ne savez pas que... quand même... un héritier..."
"Un problème à la fois, monsieur Walker. Nous savons que vous... peut-être vous ne serez pas intéressé par... prêt à... donner un héritier au trône des Markovic'. Mais... le problème peut être résolu... avec prudence..."
"C'est à dire ?" demanda Stephen un peu confus.
"D'une manière très discrète, vous pouvez avoir tous les... favoris que vous voulez et pour votre héritier..."
"Les... favoris ?"
"Pour égayer votre alcôve... Je veux dire..." dit Vaselin embarrassé. "Logiquement dans le secret..."
"Mon... alcôve ? Vous voulez dire... un garçon qui..."
"Vraiment ainsi, monsieur Walker. Logiquement dans plus grand secret. Seuls quelques saura, mais garçon qui fera tout pour vous plaisirer... votre désiré, trouver garçon plaisantable." dit solennellement celui appelé Tripovic', le chef.
"C'est à dire... Je devrais accepter de faire le prince héréditaire et... Mais votre roi, le sait-il ? Je veux dire... qu'à moi me plaisent... les favoris ?"
"Certainement pas. Juste le Conseil de la Couronne et le Premier Ministre... Pas même notre ambassadeur ne le sait, bien sûr. Personne !"
"Vous le savez, de toute façon..."
"Mais nous agents des services secrets et donc nous très muets comme du poison!" dit Tripovic.
"Comme un poisson, chef, pas comme du poison..." le corrigea Vaselin.
Stephen se mit à rire : "Oui, peut-être vaut-il mieux être aussi muet qu'un poisson !"
"Donc, vous acceptez, monsieur Walker ?"
"Mais je ne connais pas votre langue, pas du tout ! Comment puis-je?"
"La volonté d'apprendre et aussi longtemps que cela sera nécessaire, vous aurez un interprète à vos côtés..."
"Même quand... avec mon... favori ?" Stephen se mit à rire.
"Jusqu'à ce que... vous fermiez la porte de votre chambre, vous comprenez... Ensuite..." dit un peu gêné l'agent Vaselin.
"Ensuite, je vais m'en tirer, bien sûr... Mais... Moi, le prince héréditaire? Stephen Markovic'..."
"Stefan, pas Stephen..." le corrigea Vaselin.
"Oui, d'accord..."
"Acceptez-vous ?" demandèrent à l'unisson les deux agents secrets.
"Mais... je ne sais pas... et le salaire... est bon ?"
"Salaire ? Lorsque vous êtes roi, les caisses de l'État et le trésor royal seront à vous. Un roi ne prend pas un salaire."
"Putain ! Tout va être à moi ?"
"Pour le bien de la Morgovie, s'entend..."
"Et je vais avoir une couronne ? Et un trône ? Et même le sceptre ?"
"Non, pas de sceptre, mais un collier de diamants..."
"Eh bien, je pourrais aussi bien m'en contenter... et je peux jouer au cricket avec le roi d'Angleterre ?"
"Vous pouvez, et avec les autres régnants de l'Europe... mais pas avec le roi de Pannirie, notre ennemi."
"Je ne sais pas jouer au cricket, de toute façon. Mais il vous fait vraiment chier, ce roi de Pannirie... Combien d'heures de travail par jour fait un roi ? Il a un jour de congé et les vacances ?"
"Tout cela... si vous acceptez, vous sera certainement expliqué. Pour commencer, vous devriez venir à l'ambassade, et conférer avec Son Excellence le comte Srebov..." dit Vaselin.
"Je peux réfléchir à cela ? Demander des conseils à mes amis ?"
"Sa Majesté le Roi Jedrek est sur son lit de mort. Il pourrait nous quitter à tout moment et ce serait mieux si vous étiez en Morgovie avant un tel événement tragique..."
"Roi de Morgovie... Stefan Markovic' roi de Morgovie... Et avec les favoris..."
"Avec beaucoup de grande discrétion..." dit Tripovic'.
"Oui, bien sûr, comme ici en Angleterre pour cette question. Mais moi, je peux en ramener à la maison, dans ma chambre, sans problèmes... Avec une grande discrétion, mais sans problèmes..."
"Au château, dans vos appartements... si vous acceptez. On vous mènera votre favori... avec discrétion."
"Un château! Je vais avoir un château... Comme dans les contes de fées..."
"Comme tous les rois..."
"Ouais. Et... je dois décider maintenant ?"
"Ce serait grandement souhaitable."
"Et si je refuse ?"
"Pannirie nous annexer... et tous nous morgoviens dira vous malédiction pour les générations !" dit Tripovic.
"Putain ! Mais, qu'est ce que... je dis à ma famille ? A ma mère et à ma sœur ? A mes amis ?"
"Si vous acceptez, vous leur annoncez que vous êtes le prince héritier et le prochain roi de Morgovie." Dit Vaselin.
"Et ma mère et ma sœur deviennent princesses ?"
"Non... Elles sont... et restent des Walker. Mais vous pouvez les faire vivre dans le luxe et dans le confort, si vous le souhaitez."
"Au château avec moi ?"
"Si cela vous plaît ainsi... quand vous serez roi."
"Et je pourrai amener au lit tous les garçons que je veux ? Avec beaucoup de discrétion ?"
"Eh bien, oui, je ne sais pas combien, mais... Pour cela vous aurez à faire des arrangements avec le Premier Ministre..."
"Je ne dis pas beaucoup ensemble. Je n'ai jamais aimé les orgies... mais de temps en temps... peut-être un qui me plaît plus que les autres..."
"Sûrement il n'y aura pas de problèmes..."
Stephen réfléchit un instant, puis il dit : "Dois-je venir maintenant, tout de suite, à l'ambassade"
"Il vaudrait mieux..."
"Puis-je aller saluer ma mère et ma sœur ?"
"Bien sûr, mais avant d'avoir officiellement accepté, il serait bon de ne pas leur en parler encore..."
"Et je leur dis quoi, alors ?"
"Que... vous avez reçu un héritage... mais vous devez aller en Morgovie pour en jouir..."
"Mais oui, oui... après tout c'est vrai... Un royaume en héritage... Putain ! C'est grand ? Combien de gens y vivent ?"
"C'est un peu moins grand que l'Irlande et avec le même nombre d'habitants, plus ou moins."
"Putain ! Ce n'est pas rien... Roi Stefan Markovic' de Morgovie... Stefan premier ? Second ?"
"Vous seriez le premier avec ce nom..."
"Roi Stefan Markovic' de Morgovie... eh bien... si vous êtes satisfaits... je pourrais aussi bien essayer. D'accord, je vais dire à ma mère et à ma sœur que je ne serai pas là pour le déjeuner et je viens voir votre ambassadeur. "
"Merci, Altesse Royale !"
"Bien sûr que vous deux... surtout vous, Vaselin... vous savez comment faire... Oui : Vaseline... Espérons que c'est pas pour me le mettre dedans !"
"Excusez-moi, Votre Altesse ? Je ne comprends pas..."
"Rien, rien. Allons-y !"
Il entra dans le magasin et, comme convenu avec les deux agents, il dit qu'il avait reçu un grand héritage, mais que pour en profiter il devait se déplacer à deux mille kilomètres de Londres et y vivre...
"Mais comment là, tout seul, dans un pays étranger..." objecta la mère.
"Mais c'est un gros héritage ?" lui demanda la sœur.
"Maman, je ne suis plus un enfant et je vais avoir des serviteurs... et... Et l'héritage est grand, et comment !"
"Grand comment ?" demanda sa sœur.
"Assez pour vous faire vivre vous aussi... comme deux princesses... si vous voulez venir, après que je me sois installé..."
"T'imagines-tu, deux mille kilomètres ! Non, non." dit la mère, fermement. "Quoi qu'il en soit... si tu as décidé..."
"Maman, il ne va pas à la potence, n'est-ce pas ? Pourquoi vous faites cette tête ? Je voudrais y aller aussi bien, mais... Tu vas m'envoyer un beau cadeau à tous mes anniversaires ?"
"Et aussi à Noël et à la Toussaint, bien sûr. Un à toi et un à maman..."
"Eh bien, si tu dois y aller... Tu fais ce que tu veux, Stephen... Tu n'es plus un gamin maintenant." dit la mère, d'un ton un peu grincheux.
Ainsi, Stephen monta dans la voiture des agents secrets et fut conduit à l'ambassade de Morgovie. Alors qu'on l'accompagnait dans le bureau de l'ambassadeur, Stephen regardait autour de lui avec de grands yeux.
"Putain, c'est beau ici. Ma maison aussi... le château, est-il aussi beau?"
"Beaucoup plus beau, Altesse..." répondit Vaselin.
"Écoutez, Vaselin, puisque vous connaissez si bien l'anglais... vous serez mon interprète quand je serai en Morgovie ?"
"Vos souhaits seront des ordres, si vous acceptez. Ce sera comme vous le souhaitez, Altesse."
"Très bien. Vous ne me paraissez pas trop mal, même si vous n'êtes pas mon genre..." Dit Stephen en souriant.
Quand il fut introduit dans le bureau de l'ambassadeur, Stephen se sentit un peu intimidé par l'homme : le comte était grand et massif, et il portait l'uniforme de gala, tout de galons d'or et de plumes. Il avait le bicorne à plumes sous le bras et quand Stephen entra, il s'inclina profondément.
"Bienvenue à l'ambassade de Morgovie, Altesse Royale. Je suis le comte Srebov."
"Oui, je vous remercie... Comment allez-vous ? Et votre famille ?"
"Oui, je vais bien, je vous remercie. Prenez un siège, Altesse. Donc, il m'a été rapporté que vous avez accepté... Toute la Morgovie vous en est profondément reconnaissante."
"Oui, d'accord. Mais... que doit-il faire, un roi ?"
Le comte le regarda un peu surpris : "Mais... il doit régner."
"Quelle découverte ! Mais qu'est-ce un roi doit faire pour régner ?"
"Il doit pourvoir au bien de ses sujets. Se renseigner sur les problèmes et donner des ordres. Entretenir des bonnes relations avec les voisins..."
"Oh, je n'ai jamais eu de problèmes avec les voisins..."
"Avec les royaumes, les États voisins, je veux dire. Un roi est un peu un père pour ses sujets, un guide pour la nation, il écoute le premier ministre et le Conseil de la Couronne, et il prend des décisions. Pour promulguer des lois ou signer celles qui lui sont soumises par le Premier ministre et par le Conseil d'État. Donner le pardon ou signer les condamnations à mort. Présider lors des cérémonies d'État..."
"Jusqu'ici, il me paraît, rien de drôle."
"Oh, mais... il doit aussi participer à des chasses, des danses, des fêtes... des parties..."
"Hmm, ça va un peu mieux. Et je peux aussi jouer aux cartes, à la pétanque ou au backgammon ?"
"Eh bien, si cela vous plaît, bien sûr."
"Nager, aller en bateau... Jouer au bras de fer ?"
"Eh bien... si vous voulez..." répondit l'ambassadeur un peu surpris par ces questions.
"Bien, d'accord. Et que dois-je faire pour accepter ?"
"Voilà, Altesse Royale..." dit le comte, "ce document fait de vous un citoyen morgovièse... vous devez mettre une signature ici..."
"Avec quel nom ? Vos deux acolytes m'ont dit que je dois aussi changer mon nom..."
"Avec le nom anglais... Stephen Walker..." dit-il en lui tendant un stylographe d'or massif.
Stephen le soupesa, le regarda : il n'avait jamais vu un stylo si beau... Il signa. L'ambassadeur et les deux agents contresignèrent comme témoins.
"Alors... Ce document est celui qui, puisque vous êtes le descendant direct pour la ligne masculine du roi Jakub Markovic', quoique d'une branche collatérale et illégitime, vous reconnaît comme membre de la famille et, par conséquent, modifie votre nom de Stephen Walker à Stefan Markovic'..."
"Et ainsi..." dit Stephen en signant le document, "maintenant mon nom est Stefan Markovic'... Je vais devoir m'y habituer. Une bonne chose que vous n'ayez changé que le nom de famille, j'aime bien mon prénom."
"Et enfin... avec ce document notre roi Jedrek Markovic' vous nomme son héritier au trône... il manque seulement votre acceptation, votre signature. Cette fois-ci en utilisant votre nom morgovièse, bien sûr."
"Hé, je n'y ai pas pensé avant, mais... je ne comprends pas un seul mot de ce qui est écrit sur ces cartes..."
"Il y est écrit ce que je vous ai expliqué... déclara l'ambassadeur.
"Vaselin... vous me les traduisez mot pour mot, s'il vous plaît ?" Stephen demanda, en lui remettant les documents.
Après que l'agent les lui ait lus et traduits, Stephen signa aussi le document final et empocha la plume d'or.
"Bien, Altesse Royale. Maintenant, vous allez être accompagné dans l'appartement royal. Demain matin vous partirez pour Morgograd, la capitale de Morgovie."
"Mais je n'ai même pas eu le temps de préparer mes valises..." Objecta Stephen.
"Vous n'aurez besoin de rien, nous allons prendre soin de tout..."
"Et je n'ai même pas dit au revoir à mes amis... et à ma mère, à ma sœur..."
"Le capitaine Vujian Tripovic' et l'agent choisi Rasim Vaselin vous accompagneront avec la voiture officielle de l'ambassade pour saluer parents et amis. Mais je vous prie de conclure votre tour de visites d'ici ce soir... Malheureusement, Sa Majesté le Roi Jedrek... ne peut pas attendre longtemps. "
"Et cette fois... je peux dire... qui je suis devenu ?"
"Comme vous le sentirez opportun, Altesse."
Ainsi, Stephen d'abord rentra chez lui.
"Oh, tu es déjà là ? Comment ça s'est passé ?" lui demanda sa sœur. "T'as signé les papiers du notaire ? Quand dois-tu partir ?"
"Oui, j'ai signé les papiers et... je pars demain matin."
"Si tôt ? Mais je dois préparer ta valise et je dois..." dit la mère.
"Non, maman... je n'en aurai pas besoin... Vous ne devez pas vous soucier pour moi... Parce que je maintenant... maintenant je suis devenu le... prince héréditaire de Morgovie !" dit-il, et regarda les expressions des deux femmes.
La sœur éclata de rire : "Oui, et je suis la Reine des Cœurs dans Alice au Pays des Merveilles !"
"Allez, Stephen, arrête de plaisanter." Dit sa mère : "Nous ferions mieux d'aller directement à la maison pour préparer..."
"Maman, je ne plaisante pas... Regardez la voiture qui m'attends ici dehors, avec les drapeaux de la Morgovie..."
Les deux femmes regardèrent par la vitrine, puis regardèrent Stephen, une expression stupéfaite sur le visage.
"Tu n'es pas... ce n'est pas une... plaisanterie, Stephen ?" murmura sa mère.
"Non, maman, ce n'est pas une blague. Je suis le dernier descendant mâle de la famille royale de Morgovie... et ils m'ont même changé de nom... maintenant mon nom est Stefan Markovic'..." et il expliqua aux deux femmes qui était vraiment le grand-père Tomasz, et comment, par conséquent, il était l'héritier du trône.
"Et... tu deviens... roi ?" demanda sa mère, encore incrédule.
"Quand meurt le roi actuel, le roi Jedrek Markovic'. Et il va mourir bientôt, c'est pour cela qu'ils sont dans une telle hâte."
"Je le crois donc que tu n'as pas besoin de valise !" dit sa sœur. "Et cette grosse voiture ! Elle est à toi, maintenant ?"
"D'une certaine façon... oui... je crois. Ce n'est pas le roi d'Angleterre qui est le patron de cette boutique, mais... La voiture est celle de l'ambassade et donc... peut-être que je peux dire qu'elle est la mienne."
"Et tu vas épouser une reine ?" demanda sa sœur.
"Ben... de ceci nous n'avons pas encore discuté..."
"Et tu m'inviteras à ton mariage ? Tu me fais asseoir sur le premier banc à l'église ?" Demanda sa sœur, excitée.
"Nous verrons... Eh bien... Je dois y aller, je n'ai pas beaucoup de temps."
Ils se saluèrent avec des câlins et des baisers. Quand il revint à la voiture, Vaselin se précipita pour lui ouvrir la portière, et se prosterna profondément. La mère pleurait, la sœur était excitée et elles le saluèrent jusqu'à ce que la voiture soit hors de vue.
Stephen, en effet Stefan, maintenant, aurait voulu saluer beaucoup d'amis, mais ayant peu de temps, il décida de ne saluer que Vincent Edwards et son amant Nathan Hall. Il les chargerait de saluer tous les amis communs.
Arrivé à leur maison, il eut la chance de les trouver tout les deux.
"Oh, Stephen ! Quelle agréable surprise !" Nathan lui dit en le faisant entrer dans la maison.
"Vincent, Nathan... Je suis venu pour vous saluer. Demain matin je dois partir."
"Ah, bien. Et où vas-tu ?"
"En Morgovie."
"Morgovie ? Dans l'Europe du sud-est ? Et qu'est-ce que tu vas y faire ?" Demanda Vincent.
"Regardez par la fenêtre... vous voyez cette grande voiture avec deux drapeaux ? C'est la voiture officielle de l'ambassadeur de la Morgovie..."
"Et... elle t'attend ?" Nathan lui demanda.
"Elle attend... Stefan Markovic'..."
"Et qui est-il ?"
"Le prince héréditaire de la Morgovie... c'est à dire... moi !"
"Quoooiiii ? Allez, Stephen. Le luron habituel. T'as vu cette voiture et t'as pensé à nous faire une blague..." dit Nathan.
"Mais comment tu peux savoir que la famille royale de la Morgovie s'appelle Markovic' ?" Demanda Vincent qui, en tant que professeur d'histoire, n'était pas privé de ces détails.
Alors Stefan leur raconta toute l'histoire, dans tous les détails.
Nathan regarda Vincent : "Tu... tu penses qu'il est sérieux ?" demanda-t-il, étonné et incrédule.
"S'il avait tout inventé... Non... Je pense que ce n'est pas possible..."
"Ah, donc tu penses aussi qu'il se moque de nous !" Nathan dit gaiement.
"Non, Nathan. Stephen ne peut pas avoir inventé une telle chose, avec tant de nombreux détails historiques et politiques exacts, juste parce qu'il a vu la voiture ci-dessous. Je pense que nous avons vraiment chez nous un prince héréditaire..."
"Hé, les amis ! Bien que maintenant je doive m'appeler Stefan, je suis toujours votre ami Stephen ! Pour eux je suis le prince héréditaire, mais pour vous, je suis votre compagnon de débauche, ni plus ni moins qu'avant..."
"Et tu dis que... qu'ils savent que tu aimes les garçons et ils ont dit que cela va bien ?" Nathan demanda.
"Bon, ben, vraiment bien non, mais ils se résignent, afin de ne pas céder à la Pannirie, comme je l'ai dit. Je crois qu'ils se sont dit qu'après tout il est mieux avoir un roi sodomite qu'un roi pannire." Stefan rit.
"Cela ne t'effraie pas... l'idée d'avoir à faire le roi ?" Lui demanda Vincent.
"Pour l'instant, non... et puis nous verrons. Si cela me plaît pas, j'abdique et..."
"Et tu crois qu'ils te laisserons abdiquer et ainsi finir par être annexé par la Pannirie ?"
"Eh bien... si je me lasse... je me résigne à baiser avec des femmes jusqu'à ce que je leur donne une couvée de fils mâles, puis je les salue !" Stefan se mit à rire. "Hey, Vincent, tu n'as pas par hasard un atlas du monde ? Savez-vous que je n'ai pas encore vu où est cette Morgovie... comment elle est... si elle est en bord de la mer ou parmi les montagnes, si je ne sais pas... quoi que ce soit !" Ajouta Stefan gaiement.
Vincent alla à la bibliothèque et en sorti son volumineux tome de l'atlas du monde, il le feuilleta, puis mit devant lui la page avec la zone où était la Morgovie.
"La voilà ici... Et voici la Pannirie, le duché de Drgovine, ici c'est le royaume de Kruslavie, et le dernier état qui borde par un petit trait avec la Morgovie, est la principauté de Starelie... Jusqu'à il y a environ un siècle, ils étaient tous des territoires soumis au Sultanat turc, ou des protectorats. Comme tu peux le voir c'est un territoire montagneux, avec plusieurs petites rivières et des lacs minuscules..."
Stefan étudia un peu la carte, lut quelques noms, puis dit : "Je vois que je dois étudier comme un bon écolier... ainsi que la langue, l'histoire, la géographie... les traditions... L'ambassadeur m'a dit que je serai assisté par le Premier Ministre, par le Conseil d'État et le Conseil de la Couronne... J'ai l'impression qu'ils me gâteront dans tous les sens, aussi longtemps que je les laisse gouverner sans leur mettre de bâtons dans les roues. Ce qui, dans l'ensemble, peut aussi bien m'aller."
"Ai-je tort... ou tu commences à réaliser ce que tu as accepté, Stephen ?" Lui demanda Vincent, avec un sourire de sympathie.
"Non, tu ne te trompes pas du tout. Il ne pouvait pas, le roi Jedrek, mettre au monde une tribu d'enfants de sexe masculin ?"
"Pour certaines choses... même un roi n'a pas de pouvoir, cher Stephen. Pas même le monarque le plus absolu. Et de toute façon, aucun souverain n'a jamais été assis pour longtemps sur son trône, sans le soutien de la faction la plus forte de son pays." Lui dit Vincent. "Comme spécialiste d'histoire, je peux t'assurer que les rois et les dynasties changent plus facilement que les nuages dans le ciel. Les grands empires se forment, les grands empires effondrent, naissent et disparaissent de la carte géographique, des rois montent sur le trône et y restent pour des décennies, et d'autres doivent le quitter après quelques jours."
"Après tout, un roi, contrairement à tout ce que je pensais... n'est qu'un homme quelconque à qui on fait de nombreuses révérences, qu'ils déguisent comme on le fait avec un acteur de théâtre... justement tout comme c'est en train de se passer pour moi." dit Stephen. "Il peut même condamner à mort un sujet, mais il peut ne pas être en mesure de faire un fils mâle !"
"Un bon roi, peut faire beaucoup pour son pays, pour ses sujets, ainsi qu'un mauvais roi peut faire aller tout mal. Tout comme un propriétaire d'usine, ou un père de famille." Lui dit Vincent.
"Eh bien... Je vais faire pour le mieux..." Commenta Stephen.
Il salua ses amis, en leur promettant qu'il enverrait ses nouvelles, "... si vous ne les lisez pas sur les journaux !" Conclut-t-il et il sortit. Ses amis, de la fenêtre, le virent monter dans la voiture de l'ambassade et la regardèrent partir.
Stefan fut ramené à l'ambassade et accompagné dans l'appartement royal.
"Son Excellence envoie demander si Votre Altesse préfère avoir ses repas avec sa famille ou seul ici dans l'appartement." Lui demanda Vaselin.
"Ici, dans l'appartement... J'aurais peur de perdre la face, à table avec l'ambassadeur. Mais... je dois vous demander une faveur, Vaselin..."
"Commandez, Altesse Royale !"
"Pourriez-vous demander qu'ils amènent le repas pour deux... et venir manger ici avec moi ?"
"Comme vous désirez, Votre Altesse."