Lorsque les deux émergèrent, détendus, de l'intense plaisir qu'ils s'étaient donné l'un l'autre, Rafael s'est levé et s'est assis, a tendu la main à son amant en l'invitant à se lever et l'a regardé avec des yeux étincelants.
Il lui dit : "Maintenant, je dois faire deux choses que depuis quelque temps j'espérais de pouvoir et devoir faire. La première est que je communique au personnel de la villa qu'ils ont maintenant deux maîtres, toi en plus que moi. Puis je convoquerai ma cuadrilla, mes assistants. Je leur annoncerai que je me retire de la tauromachie, puis je couperai la coleta et je te la remettrai, comme un gage de mon don total à toi."
"J'ai encore quelques jours, avant ma prochaine tournée ici en Espagne. Vraiment tu viendrais avec moi ?"
"Bien sûr, je n'entends pas me séparer de toi, maintenant que nous nous sommes déclarés notre amour. Je te servirai d'assistant, de serviteur, de manager, de chauffeur, de tout ce que tu veux ! Tu sais déjà quand tu devras commencer et quel tour tu devras faire ?"
"Non, j'attends que mon agent me soumette le programme. Mais ensuite... je devrais revenir en Italie, peut-être, et faire d'autres tournées dans d'autres pays. Tu viendras toujours avec moi ?"
"Bien sûr, même sur le toit du monde ! Et quand tu prendras quelques jours de repos, nous pourrons revenir ici, qui est maintenant aussi ta maison. Ou n'importe où tu veux."
"J'ai aimé faire l'amour avec toi... te sentir en moi !"
"Moi aussi, mon bien-aimé, de faire l'amour avec toi, me sentir accueilli en toi. C'était magnifique, vraiment."
"Plus qu'avec n'importe lequel de tes autres gars ?"
"Mes autres garçons? Et qui s'en souvient, d'eux !" s'exclama joyeusement Rafael. "N'y pense pas, mon bien-aimé. Je te jure que je ne te donnerai jamais de raison d'être jaloux."
"Je te fais confiance."
"Et tu fais bien ! Mais maintenant... Il m'est venu un grand appétit. Que t'en dis-tu si je fais préparer un barbecue sur la terrasse d'en bas, et que je te présente ainsi au personnel de la villa comme leur nouveau maître ?"
"Comme tu désires, pour moi c'est bien."
"Habillons-nous, puis j'organise tout pour le dîner. En attendant, tu quitteras ta chambre et tu transféreras tout dans ma, dans notre chambre. Je vais t'envoyer un garçon pour t'aider. Vierge du Rosaire, comme je suis heureux ! Merci, Fernando."
Le baryton sourit : "Je ne sais pas qui de nous deux devrait dire plus merci à l'autre, je me sens bien comme jamais auparavant."
"Même quand les choses allaient bien avec le comte ?"
"Quel comte ? Et qui s'en souvient encore !" s'exclama joyeusement Fernando, dans le même ton que peu avant Rafael avait dit ces mots.
Le beau toréador rit comme un enfant heureux, l'enlaça et l'embrassa. Ils s'enfilèrent leurs maillots de bain et descendirent dans leurs chambres.
Pendant que Fernando ramassait ses affaires pour déménager, passant devant le miroir, il se regarda et sourit. "Dieu, comme je suis heureux !" dit-il à sa propre image. "Je me demande pourquoi je n'ai pas cédé avant à la cour de Rafael !"
Il se déplaça pour recommencer à ranger ses choses dans les valises, mais il s'arrêta et revint devant le miroir : "Hey, et à partir de maintenant, tu remettras l'air d'Escamillo dans tous tes concerts, compris ?" Il se fit un clin d'œil et retourna à se préparer pour déménager, en fredonnant "toréador, toréador !"
Il était en train de finir de mettre ses habits dans le placard de la chambre de Rafael, aidé par un serveur, lorsque le beau toréador entra. Fernando ne l'avait ni entendu, ni vu entrer dans la pièce. Rafael fit un signe de la tête au garçon, qui discrètement quitta la chambre. Alors il alla derrière Fernando et le prit entre ses bras.
"Hey, mais qu'est-ce..." dit le baryton se tournant brusquement, mais il vit que c'était Rafael, alors il sourit : "Ah, c'est toi."
"Qui croyais tu que c'était ?" lui demanda amusé le toréador.
"Eh bien, j'étais juste avec ton serviteur et..."
"Et c'est pourquoi tu t'es tourné avec une telle énergie ?"
"Mais bien sûr. Pourquoi, si c'était lui, j'aurais dû lui permettre de m'embrasser ?"
Rafael le serra plus près de lui et l'embrassa. Fernando se colla contre lui. Bientôt, ils sentirent monter réciproquement leurs érections.
"Tu me veux ?" lui demanda Fernando, avec un sourire heureux.
"Comment pourrais-je ne pas avoir envie de toi quand tu es comme ça, entre mes bras, car mon désir brûle juste à penser à toi ? Et puis, ne sais tu pas que nous espagnols avons le sangre caliente ? Et nous les toréadors, nous l'avons encore plus caliente que les autres espagnols ?"
"Et que toi, Rafael, tu l'as encore plus caliente que les autres toreros ?" dit Fernando, en souriant et en se serrant contre lui.
"C'est vraiment ainsi. Ne souhaites-tu pas essayer comment on est à deux sur mon, sur notre lit ?"
"Oui. C'est la première chose à laquelle j'ai pensé en entrant ici, quand j'ai vu ce lit si grand et beau... Il a un aspect vraiment très accueillant. Qu'en dis-tu si nous le mettons un peu en désordre, avant le dîner ?"
"Je t'aime ! Je ne l'ai jamais dit à personne... et il est tellement agréable de pouvoir le dire, et aussi se l'entendre dire. Tu ne me le dis pas, toi aussi ?"
"Je ne me lasserai jamais de te le dire. Je t'aime, Rafael ! Je t'aime, mon reyecito !"
Le torero le poussa doucement vers le lit, en lui ouvrant lentement un après l'autre les boutons de sa chemise. Puis il le fit s'asseoir sur le bord et se mit à genoux devant lui pour lui enlever ses chaussures. À ce moment, on frappa à la porte.
"Qui est-ce ?" a demandé Rafael à haute voix, en tournant la tête vers la porte.
"Puis-je entrer, Rafael ?" demanda la voix d'Alba.
"C'est urgent ?" demanda le toréador, un peu agacé.
"Le médecin est venu pour t'enlever les points de suture. L'as tu oublié ? Peut-on entrer ?"
Rafael regarda Fernando avec une expression désolée et celui-ci hocha la tête avec un sourire. Puis ils se levèrent.
"Entrez !" cria Rafael.
La porte s'ouvrit et Alba entra, suivie par le médecin et par Beatriz qui portait une cassette avec ce qui était nécessaire.
"Bon... on se voit plus tard..." murmura Fernando se reboutonnant sa chemise.
"Oh, nous vous avons dérangé ?" demanda Beatriz en posant la cassette sur une table de chevet.
"Oui, nous étions sur le point de faire l'amour !" déclara tranquillement Rafael.
"Oh, il a toujours la boutade prête, el reyecito!" s'exclama gaiement le docteur.
"Je crois que ce n'était pas une boutade, docteur. El reyecito et moi avons eu le béguin pour le beau baryton italien !" déclarait joyeusement l'infirmière. "Mais il semble avoir eu plus de succès que moi. "
Fernando rougit et sortit presque précipitamment.
"Beatriz, Beatriz, tu as embarrassé mon amant !" la réprimanda Rafael en dénudant son torse et en s'allongeant sur le lit.
"Comme c'est mignon, n'est-ce pas ?" Dit l'infirmière avec un sourire. "Eh bien, je suis heureuse pour vous, monsieur Jiménez ! Félicitations."
"Je pensais de vous en faire part ce soir au barbecue." dit Rafael.
"Nous allons donc garder toutes nos bouches fermées, pour ne pas gâcher la surprise pour les autres." déclara l'infirmière.
Le médecin lui enleva les points de suture. "Superficiellement la blessure s'est bien cicatrisée, mais malheureusement, la cicatrice restera. Cependant, essayez de ne pas fatiguer vos poumons pendant au moins un mois de plus. "
"Oh, la cicatrice ne me préoccupe pas, c'est un peu comme une médaille d'honneur. Quant à forcer les poumons, le baryton c'est Fernando, ce n'est pas moi." dit gaiement le toréador.
Lorsque le médecin et Beatriz furent sortis, Rafael dit Alba : "Ce soir, je voudrais faire un cadeau spécial à mon Fernando, comme symbole de mon amour. Que me conseilles tu ?"
Le secrétaire le regarda avec un léger sourire : "Tu n'as aucune expérience dans ces choses, n'est-ce pas ? Il était temps tu tombes amoureux, vieux garçon impénitent. Tu as enfin repris ta vie en main. Félicitations. En ce qui concerne le cadeau, une bague serait la chose la plus... logique."
"Demande au chauffeur de t'emmener en ville et achètes-en une... la plus belle que tu puisses trouver, adaptée à un homme !" dit-il en descendant du lit et en se rhabillant.
"Mais il faudrait connaitre la taille qui convient pour monsieur Adami..."
"Ah, c'est vrai... Alors ? Comment pouvons-nous faire ?"
"Il y a trop peu de temps, et monsieur Adami ne porte aucune bague, prendre la mesure n'est pas une chose facile."
"Alors, qu'est-ce que je peux faire ?" demanda à nouveau Rafael, perplexe et avec une expression navrée.
"Peut-être quelque chose d'un peu inhabituel... mais qui pourrait être sympathique..."
"Dis-moi !"
"Pourquoi n'écris tu pas un bon pour deux alliances identiques à vous faire faire à la première occasion par l'orfèvre, et ne le lui remets-tu pas ce soir ?"
Rafael se mit à rire: "Oui, ça me plaît, c'est une idée originale. Toi qui tu as une belle écriture, tu pourrais me le préparer, et puis me le faire signer ?"
"Oui, volontiers. Encore une fois, félicitations, vous formez un très beau couple."
"N'est-ce pas ? Je ne me suis jamais senti aussi heureux dans ma vie, Alba !"
"Pas même après les succès dans la plaza de toros ?" lui demanda la femme avec un petit sourire.
"Bien sûr que non, de quoi tu parles ! Là on célèbre la bataille entre la vie et la mort, mais aujourd'hui je célèbre l'amour ! L'amour est plus important que toute autre chose."
"Rafael, je n'en crois pas mes oreilles ! Toi qui ne pensais qu'a profiter des garçons qui se donnaient à toi, et les oubliais dès que tu en trouvais un autre qui t'attirait plus, comme toutes les nouveautés. Tu me dis que tu as l'intention d'être fidèle au beau baryton ?"
"Bien sûr! Nous sommes amoureux, je te l'ai dit. Rien à voir avec les aventures que j'ai eu jusqu'à présent. Fernando m'a conquis totalement. Mais toi, quand vas-tu te trouver un partenaire ?"
"Le jour où j'en trouverai un qui me convaincra, je ne le laisserai pas s'échapper !"
"Peux tu aller vérifier où en est la préparation du barbecue ? Je dois aller chercher Fernando..."
Rafael le trouva sur la terrasse couverte, assis à califourchon sur une chaise à regarder le panorama, le menton appuyé sur les bras croisés sur le dossier.
"Fernando... Je suis désolé que Beatriz t'ait mis dans l'embarras." lui dit-il en posant sa main sur son épaule.
"Peu importe, peu importe. Elle est peut-être un peu trop exubérante, mais elle n'est pas mauvaise. Et après tout, elle a dit seulement la vérité. Si le médecin n'avait pas été présent aussi, un étranger..."
"Oh, mais tu ne dois pas t'inquiéter pour le docteur. Il connait mes goûts, nous en avions aussi discuté quand j'étais encore à l'hôpital. Il a un esprit ouvert, parce que son frère, le plus jeune, est gay et vit dans la maison des parents avec son petit ami."
"Vous espagnols me semblez beaucoup plus ouvert que nous italiens, à propos de ces choses."
"C'est logique ! Nous, pour notre chance, n'avons pas le pape chez nous !" se mit à rire Rafael.
"Et nous, pour notre chance, n'avons pas des corridas chez nous !" répondit Fernando, le taquinant.
"Ah, mais comment ai-je pu tomber amoureux de quelqu'un qui n'aime pas la tauromachie ?" demanda le beau torero, qui se pencha pour l'embrasser.
"Et comment j'ai pu me laisser séduire par un torero qui se laisse encorner par le taureau ?" rétorqua Fernando, espiègle.
"Après tout, peut-être que je dois remercier ce taureau, parce que s'il ne m'avait pas blessé, tu ne serais pas venu me voir. Et si tu n'étais pas venu me voir, nous ne serions pas ensemble."
"Ne sois pas stupide ! Je ne peux pas le remercier, pas du tout, ce taureau." déclara Fernando. Il se leva, posa ses mains sur ses épaules et appuya le front contre son front. Puis, à voix basse, il dit : "Mais même si tu dis des bêtises, je t'aime, mon beau toréador !"
"Et je t'aime, mon beau baryton. D'accord, je ne dois pas remercier le taureau, mais je peux au moins dire que tout le mal ne vient pas pour nuire."
"Tu viendras vraiment avec moi quand je devrai reprendre mes concerts, mes tournées ?"
"Essaie de m'en empêcher !"
"Ne t'ennuieras tu pas ?"
"Cela dépend de toi. Non, sérieusement, il suffit que tu me donnes quelque chose d'utile à faire pour toi, avec toi, et que tu continues à me donner ton amour, et je ne m'ennuierai certainement pas. Et pendant tes opéras je serai dans les coulisses à te regarder et à me réjouir de tes triomphes. "
"Mais si, au lieu d'applaudissements je recevais des sifflets ?"
"Alors, je serai là pour te réconforter et te remonter le moral !"
Une légère toux attira leur attention. Un des serviteurs était à la porte de la terrasse couverte.
"Monsieur Jiménez, le barbecue est prêt et tout le personnel de la villa vous attend pour commencer."
"Merci Pedro, nous descendons tout de suite."
Quand ils sont arrivés à la terrasse inférieure, le barbecue était déjà allumé et le chef était prêt à cuire la viande, et deux tables avait été installées avec d'autres aliments et des boissons. Le ciel déjà sombre, portait uniquement les dernières traces du coucher du soleil à l'horizon. Des lanternes allumées, savamment disposées dans la terrasse, l'éclairaient dans la nuit qui avançait. Alba donna une enveloppe à Rafael qui la remercia avec un sourire.
Le torero attira l'attention de tout le monde.
"Chers amis, avant de commencer la fête de ce soir, je dois vous en dire la raison. Je veux partager avec vous ma grande joie. L'ici présent Maestro Fernando Adami et moi aujourd'hui, nous venons de nous déclarer notre amour l'un pour l'autre et avons décidé d'unir nos vies. "
Une salve d'applaudissements et un chœur de vivat et de félicitations remplirent la terrasse.
Rafael continua : "J'aurai souhaité, dans cette belle occasion et devant vous tous, lui donner un anneau comme un symbole de ma fidélité, mais je n'ai pas eu le temps d'en acheter un. Donc, pour le moment, cher Fernando, je te le donne un gage de ma volonté." dit-il, en lui tendant l'enveloppe. Puis, tandis que Fernando ouvrait et lisait la carte qu'elle contenait , il dit aux autres : "C'est un bon pour deux alliances que nous irons choisir ensemble !"
Une nouvelle salve d'applaudissements accueillit ces paroles, et Beatriz cria : "Mais que c'est beau ! Comme c'est romantique ! Et vous, Maître, qu'est-ce que vous donnez au reyecito en retour ?"
"Beatriz ! Quelle question impertinente !" s'écria Rafael.
"Non, non, elle a raison." dit le baryton, et l'infirmière sourit. "Rafael n'a pas les anneaux, et je n'ai pas ici l'orchestre. Mais à partir de maintenant, chaque fois que je chanterai de l'air de toréador de Carmen, je le dédierai à mon Rafael."
Applaudissements et acclamations accueillirent ses mots.
Fernando fit signe de faire silence, puis il chanta l'air du toréador Escamillo du deuxième acte de la Carmen de Bizet, en français :
"Votre toast, je peux vous le rendre,
Señor, señors car avec les soldats
Oui, les Toreros, peuvent s'entendre..."
Et quand il a chanté les derniers versets il prit la main de Rafael :
"Et que l'amour t'attend,
Toreador. L'amour t'attend!
L'amour! L'amour! L'amour!
Toreador, Toreador, l'amour t'attend!"
Tous ceux qui étaient présents l'applaudirent longtemps, et Rafael le prit dans ses bras et l'embrassa. Un nouveau long applaudissement souligna et accompagna leur baiser.
Et la fête commença.
Pendant la soirée, Rafael parla avec son agent, lui demandant de rassembler sa cuadrilla le plus tôt possible, pour leur annoncer les premiers qu'il faisait ses adieux aux corridas.
"Ils seront tous très désolés, el reyecito. Tu sais combien nous te sommes tous dévoués et fidèles."
"Oui, je le sais, et je vous remercie. Mais je dois le faire."
"Je comprends, certes, si les médecins t'ont dit que tu ne dois, tu ne peux pas continuer..."
"Ce n'est pas seulement pour cela. Si cela ne m'avait été dit que par les médecins... Je n'ai jamais craint la mort, tu le sais, j'aurais presque certainement désobéi. Mais je l'ai promis à mon Fernando."
"Alors c'est que tu l'aimes, jusqu'à ce point ?"
"Tu en doutais ? Tu croyais que Fernando pouvait être un des nombreux gars que j'ai mis dans mon lit, que j'ai baisés ? Non, mon cher ami. Si le taureau n'a pas pu atteindre mon cœur avec sa corne, c'est parce que longtemps avant Fernando y était déjà venu avec sa simple présence."
"Tu nous manqueras à tous. ..."
"Tous les toréadors, s'ils ne sont pas tués par le taureau, tôt ou tard quittent la plaza de toros à jamais. Même beaucoup plus grands et plus célèbres de moi, parfois, ils ont quitté quand ils étaient plus jeunes que moi."
"Je respecte ta décision, mais ce sera pour toute ta cuadrilla un triste jour quand tu couperas ta coleta."
"Je sais, je comprends. En hommage à eux, je le ferai en leur présence, ici dans ma maison. Ensuite, je vais en faire don à mon Fernando. Je te prie de les avertir, puis fais-moi savoir quand ils seront tous présents. Je vous emmènerai dans les salles où je garde tous mes souvenirs et j'en donnerai un à chacun d'entre vous, comme dernier souvenir et comme geste d'adieu."